Mon fils sort à l'instant. Déconcertant. Kevin est allé faire un tour dans le Parc pour nous laisser aborder en privé les sujets délicats, s'il en est. Or, selon monsieur mon kid, il n'en est pas. Qu'il vive à nouveau ses journées dans la rue n'est pas un sujet délicat. Qu'il dorme ses nuits au Refuge de Bigras n'est pas un sujet délicat. Qu'il croie en l'Atlantide, les bases lunaires états-uniennes secrètes et le troisième oeil de Lobsang Rampa n'est pas un sujet délicat. Tout baigne, papa, t'en fais pas.
Il jasait avec Kevin et j'étais bien content, ça sonnait rationnel au début et Vigneau, comment dire, si je l'avais connu comme mon aîné, disons à vingt ans, qui sait les sommets que j'aurais atteints aujourd'hui? Je veux dire: ça me semble un beau cadeau à faire, un cadeau de père, à faire à mon petit, de le mettre en rapport avec un Kevin (qui, est-il besoin de le préciser, ne se trouve pas sous le pas d'un cheval, sauf en fin de cuite au festival western de St-Tite).
Ils partagent un soyeux souvenir de jeunesse: une série animée japonaise intitulée Les Cités d'Or, historiquement située au temps de Cortez. Or, cette merde criminelle est rediffusée ces jours-ci à Radio-Canada, et nous en avons subi un épisode à trois heures et demie. J'ai tout compris. Des frégates armées à l'énergie solaire, des Olmèques extra-terrestres, des enfants du soleil, des tatouages héréditaires mystiques, en veux-tu du nippon en voilà. Quand je pense que ma mère interdisait à JC de regarder les Simpson's, de crainte que ça ne lui pollue l'esprit. Et tout ce temps je me croyais un père, sinon adéquat, du moins vigilant! Résultat, toute conversation cartésienne ou constructive avec mon fils est impossible, un esprit brillant a été bâti sur des fondations de sable avec du bois rongé par les termites. Il a vingt ans! Que pourrais-je faire pour le redresser à vingt ans? C'est pas juste. Il valait tellement mieux.
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