4.9.08

Trop beau pour être vrai. Sort of.

Ce qui me fait chier, la seule affaire astheure, c'est qu'il faut que j'ajoute ce post-scriptum à mon billet de tantôt sur les chiens, les chats et les bodysnatchers. Je ris, un peu nerveusement mais je ris, de ce qui se passe en ce moment-même, et c'est mieux que toutes les alternatives, mais je voulais pas en rajouter, on va encore me reprocher de souiller la place publique avec une affaire privée, mais qu'est-ce que vous voulez: y a pas un écrivain au monde qui serait pas obligé d'écrire ceci.

Je l'ai dit, les flics sont venus hier matin tôt sur appel d'un voisin excédé, ils sont entrés, ont enquêté, ont failli l'arrêter, ont accepté de la laisser partir à condition qu'elle parte et ne revienne pas. C'était prévisible: j'avais réussi avec peine il y a six semaines à le lui éviter, en dissuadant les gens d'ici de la faire expulser, mais je les ai vus pâlir quand elle est arrivée l'autre soir.

Eh ben, je finissais de polir mon billet quand on a frappé à la porte et j'ai ouvert et vous devinez le reste, j'ai refermé, abasourdi, j'ai dit tu dois filer, ils vont rappeler leur 911 et ce coup-ci tu dors au poste, mais elle n'entendait pas, occupée à gémir que je suis censé être un altruiste, a siffler pitié, j'ai essayé une dernière fois de lui faire comprendre a travers la porte que c'était justement pour ça que je lui recommandais de prendre de l'avance, on n'est pas dans une bourgade de province ici, quand les flics te disent de te faire oublier, tu déménages, mais c'était comme chaque fois que je lui ai parlé d'expérience, elle est persuadée que le monde est un théâtre d'ombres et de guignols pour son amusement, un film avec des monstres en celluloid, ou la police fait semblant de jouer la police, le Hells est un acteur déguisé en Hells, l'écrivain est un fat ignorant qui n'en sait pas plus qu'elle seulement parce qu'il a gagné au loto de l'édition douze fois en vingt ans alors qu'elle est bloquée page 30 de son premier manuscrit, l'université vaut un abonnement au Nautilus, la psycho est une science et son con n'enverra pas de conséquences vers sa tête et son coeur juste parce qu'il est moderne, et oh, bordel, je vous épargne le reste, que je sais par coeur même si j'ai pas entendu un mot de plus, le disque est usé, anyway, je sais que c'est inconcevable, même moi j'y crois pas, mais elle tape comme une sourde dans la porte au même rythme que je tape ces mots, et soudain les hurlements du chien et les plaintes de la scie se mêlent en un parfait son blanc, lénifiant, insonorisant...

C'est Mac qui écrivait pas plus tard que le premier septembre (il permettra que je le cite): Uhm… Il est vrai que, si vous me permettez de m'auto-citer, « ça peut toujours être pire. » Ne jamais oublier ça… Tout peut toujours être pire. Pas besoin de 100 giga de mémoire pour se rappeler de ça.

J'avais trouvé ça spirituel, viril et prophétique comme il convient à l'écrivain de l'être quand il transforme ses aléas en matière littéraire, mais ça me chicotait, j'avais pas réalisé que j'ai commis une métaphore avec le sol qui s'ouvre sous vos baskets quand vous pensez avoir touché le fond, ça vient juste de me revenir, je me rappelle pas encore dans quel livre, ça fait un bail, mais bon, ce qui me buzzait autour du crâne comme une mouche merdière invisible, c'était ce sentiment effrayant que Mac avait raison, sur toute la ligne, sauf le bout qui se rit des gens qui l'oublient, héhé.

Je me marre maintenant, je ris de moi et de cette vie avec de grands sursauts de bedaine, la tension sort, je pense au fameux acronyme anonyme que Mac et moi nous sommes amusés a forger puis a répandre au temps des fêtes sur la blogosphère comme des Santa Claus hilares et seuls: LYES. LYES. LYES. La Yeule En Sang. A force de rire tellement...

L'usure d'une force de la nature

These last days I've been caught between a howling dog and a crazy screaming pussy, I'm beginning to feel like some character in a Poe and/or de Maupassant short-story, except this doesn't end, they took the pussy away but the hellish bitch of a dog keeps on calling that woman who left it there alone this morning and the one before and the one before that, every three minutes like clockwork you hear this winter wind high-pitching through the closed windows and you wake up in a sweat, except the windows are wide open, there's no wind, no winter, it's a sweet september, it's going to be gone before we know it, and that grotesque nevrotic beast that can't live with itself a few hours a day without crying those disgusting sounds of degenerate despair so someone somewhere will come and pet it, oh God I fear that kind, they're are more and more everywhere, dogs thinking they're cats and girls thinking they're Hemingway and failed middle-aged men suddenly remembering they were raped in the shed the day Bobby Kennedy was shot, all those endless legions of lost creatures joining the parade of victims, chanting together, feeling stronger, this is all too much for me to comprehend, I only know those zombies will win in the end, there won't be one single Howard Roark-like character left standing anywhere, male or female, human or canine. I haven't thrown up in twenty years but I'd give anything for a bitter and brutal barf right now. I seem to remember I felt better afterwards.

There's some guy using an electric saw out there, not a pleasing sound at all usually, but the stinking dog still manages to screech worst. Either kill it or kill me, please.

When the moon hits your eye like a big pizza pie, je bidouille.

Ting-a-ling-a-ling, ting-a-ling-a-ling, chante, mon gars, fais comme un oiseau, un piaf qui ne se cachera pas pour mourir: j'ai bidouillé toute la nuit ce blog en pestant et bénissant et priant le nom d'Annie Strohem, qui m'apprit à le faire et comment ça s'appelle.

Si on vous répète que je suis le pionnier du blog littéraire au Québec, rappelez-vous que sans elle, venue avant moi, j'en serais toujours à graver quelques rimettes farouches à la pointe du canif sur la surface cathodique d'un moniteur à Off, tout en parcourant les touches du clavier de mon oeil impatient, louche et gauche, cherchant le piton pour Fiat Lux!

Mais enfin, j'étais doué pour la chose, et quoique impatient je n'arrêtais jamais: c'est ce qu'elle m'apprit en premier, que l'ordi c'est ainsi, que Capri c'est fini, qu'il faut se buter comme un âne aux problèmes et se résoudre à en voir surgir deux pour chacun qu'on résout, mais qu'on finit par aboutir, si on est taillé dans cette étoffe qui préfère se salir sans sortir des balises et s'user en polissant du code HTML jusqu'aux palpitations de l'aube. Bidouiller, c'est ça, et ça fait un bien fou quand on vient de rompre enfin avec la folie de son amour, qu'on veut marquer le jour d'une pierre wysiwyg, une pierre tombale, une borne romaine, une garnotte à slingshot, un galet pour lapider le temps perdu et s'éloigner soulagé dans l'autre direction.

Bidouiller des onze, douze heures, après un temps, quand il vous en fallait dix avant, c'est vous démontrer à vous-même que si le souffle est court et le désir moins ardent (qu'avant), vous n'en poursuivez pas moins l'ascension et la traversée des alpages, pétant au passage quand vous croisez les bêlants génies qui vous y enverraient paître si vous leur présentiez un miroir juste après leur avoir dessiné un mouton.

Enfin, j'espère que le nouveau design ne vous déplaît pas trop. Moi, je sais pas, j'ai pus les yeux en face des trous.

Hearts will play
tippy-tippy-tay,
tippy-tippy-tay
Like a gay tarantella...

2.9.08

Un vers dans l'Apple, ma clique et les claques

And, in the end, the love you take
Is equal to the love you make...


The End, Abbey Road, The Beatles ( Lennon/McCartney, comme si Lennon pouvait écrire un si beau vers), Apple Records, 1969.

+++

C'est ça, Patrick, merci ben gros, astheure on va avoir tous les obsédés par la clique du Plateau sur le dos, vont crier à la concussion, gémir qu'on prévarique, grattons-nous le dos car ça nous pique...

Héhé. Thanks, man. Suis touché.

J'ai lu quelque part, j'oublie où, qu'une portion de la gens carnetis profitait du 31 août pour ploguer cinq blogs cools récemment découverts, ou cinq qu'on ne fréquenterait pas avec assiduité parce qu'ils sont éloignés de nos préoccupations mais auxquels on reconnaît des qualités qui les distinguent.

Touché, disais-je, donc débiteur: j'ai une créance karmique envers la blogoboule. J'ai passé la nuit, ça s'est adonné ainsi, à labourer à travers des sites pourris de qualités mais qui me faisaient fort chier, et j'ai pas envie d'en parler pantoute, mais ma liste de marque-pages contient aussi de chouettes trouvailles, à peu près cinq, so let's (blog)roll: je ne vais pas élaborer maintenant sur mes raisons parce qu'il me reste dix minutes gros max avant de m'effoirer comateux sur le clavier.

1. Simplement: un récent billet, magistral, voit Mars péter la gueule à Février...

2. HoaxBuster: Who you gonna call? Où l'on voit que l'existence des légendes urbaines n'est pas une légende urbaine.

3. Wired: beaucoup de stock, dont des blogs captivants, pour la tête d'ampoule qui a tout sauf un lien vers Literotica.

4. WaybackMachine: un insondable cimetière muséal de l'internet, dont les blogs morts et déterrés.

Faut que j'aille me coucher...

31.8.08

Boucle bouclée, cerise ardente sur un sundae fondant

Mac et Antonios sont en vacances quelque part au fond de la mer, mais le reste de la tribu disponible a fait la job comme d'habitude, chirurgicale, articulée, digne, intelligente et passionnée, sans omettre de faire chier du sang aux caves qui oublient prudence et grâces sociales.

Y a que l'exposé de Meth qui n'a pas trouvé grâce aux yeux du rédac-chef de Liberté au Canada. C'est savoureux en sacrement, surtout pour ceux qui la connaissent: elle pond un papier tout en nuances et en retenue, et on lui refuse le crachoir pour cause d'attaques ad hominem. Ils savent pas ce qu'est une attaque ad hominem tant qu'ils l'ont pas rencontrée, héhé: elle est capable de rapprocher considérablement les hominem d'ad patres d'un seul regard si elle se fiche en rogne.

Alors, bien sûr, son texte va paraître ici. En complément de ceux qu'on trouvera là-bas. Qui ont tous été rédigés pour faire ravaler ses tristes gonades au goret gorlo qui s'est figuré pouvoir nous grogner son haleine de Goering sans qu'on en fasse du bacon.

Oh, pour les nouveaux: ici on cultive l'attaque ad hominem, une journée sans attaque ad hominem est comme une polka sans accordéon.

L'ironie juteuse, full goo, c'est qu'elle a écrit ça pour répliquer à ce qui ressemble diablement à une attaque ad hominem, et que quand l'homo c'est moi, elle saute dans le tas. Ma reine.

Methane Alyze aka Mélissa LeBlanc

Salut

L'art impopulaire ça inclut aussi la relève, mais pas tant que ça finalement, et c'est normal, l'artiste doit faire ce passage nécessaire de fronter sa vie pour l'art le temps que "ça" se fasse dans le vide de la (re)production artistique.

Je suis sur mon premier roman et je me demande si Vallée a pas chié un peu trop en même temps qu'il pondait le sien (Un titre, kekchose?) pour devenir fasciste névrotique schizoïde de même et feindre ignorer ce qui différencie un artiste d'une personne normale, surtout après que ledit artiste a publié, exposé ou diffusé le moindrement, obtenu l'approbe ou l'opprobre de son public et de ses pairs et qu'il a enfin accès à cet univers mirifico-mystique de la subvention artistique nationale de spécialité. Viva la republica grand signor!

Passke tsé, y'a une sorte de pimp sherbrookois qui a même piqué des affaires dans mon épicerie, je suis obligée de pawner trop régulièrement mon portable et je me dis Whoa Nelly! que tu sois écrivaine québécoise ou revampée par Timbaland, ce que vous financez à fond au Canada c'est déjà pimpé, passé, douteux, listériosé sur les bords anyway, à mon goût à moi - la relève - ça fait que je vais continuer à maximiser ma subvention HLM de gens à bas revenu en région et à m'inspirer de la perte de la garde de mes enfants, parce que j'ai pas de char, pour garrocher quelques heures de sport extrème littéraire dans les cathodes numériques, tout à votre joie future.

Ouais, j'aimerais bien qu'on me paye d'avance mais ça ferait de moi une pute. En fait je me limite à la massothérapie, deux jours semaine.

Pour terminer ma mauvaise dissertation, vues d'ici, les subventions artistiques me semblent accordées au mérite à des artistes et des ratistes qui ont travaillé et travaillent activement à traduire les osties d'absurdités schizophrènes qui meublent la tête de gens comme Vallée.

On est tous des artistes quand on est up.
Toujours un plaisir de casser du fasciste et de vous dire fuck.

En attendant si vous êtes dans le huit un neuf cet automne et voulez voir moi et d'autres affaires littéraires pas financées que du monde encore plus jeune que moi font en Estrie dont l'adorable et prometteuse Sophie Jeukens qui vous dit rien de moins que :

"Vous êtes tous joyeusement conviés à l'événement culturel le plus déjanté de la rentrée 2008!
N'hésitez pas à y inviter à votre tour tous tous tous vos nombreux amis ;P
Au plaisir!".
Event: Zone d'exclamation publique
"lectures, open mike, musique, expo, foire du livre et autres p'tites folies"
What: Performance
Host: Les Plumes de L'ombre
Start Time: Wednesday, September 17 at 8:00pm
End Time: Wednesday, September 17 at 11:00pm
Where: Café Esprit et Vie (300 rue King Ouest Sherbrooke)."

Bye.

30.8.08

OK, la gang, remuez-vous, j'ai besoin de vous autres.

Allez siouplè faire un peu d'animation de ce côté. Brassez pas trop de marde, pareil, ce monde là est pas accoutumé à nos manières...

Lemieux a compté pour moi, il compte toujours, c'est un peu ce que je lui écrivais il y a quelques semaines, vingt-cinq ans après. J'ai pas le texte, je l'ai rejoint par le biais d'un formulaire sur son site, j'ai pas le texte et c'est rarissime que yours truly n'ait pas le texte, I mean je suis celui qui conserve ses listes d'épicerie pour le futur bénéfice des exégètes, je suis celui qui dort avec un extincteur sous son oreiller, je suis le notaire barbare des temps éteints, celui qui épingle chaque éclat de sa vie comme un papillon tropical et qui documente, documente, archive, documente, documente, réitère trois fois le verbe pour s'assurer que c'est documenté, mais j'ai pas ce texte-là et c'est tant mieux, lui l'a, c'était privé, parfois j'ai du mal à tracer la ligne entre le public et le privé, je vais donc de mémoire me paraphraser: je lui exprimais, vingt-cinq ans après, que son invitation au restaurant quand j'avais dix-huit ans suite à ma lettre parue dans le courrier des lecteurs du Devoir m'avait durablement marqué, de plus en plus avec le temps. Il devait avoir l'âge que j'ai maintenant, il était une sommité dans son boulot en plus d'un essayiste publié en France, et il était passé par-dessus mon extrême jeunesse, à côté de mon écoeurante maladresse, il s'était intéressé à ce que pouvait avoir en lui le signataire de cette lettre. Or, au fil des ans et de ma propre carrière, je me suis retrouvé souvent, je m'y retrouve chaque jour davantage, dans la position de garder contact avec la jeunesse agissante et de retarder le naturel qui m'inciterait à contourner la jeunesse agissante, ces abrutis de boutonneux ignares qui m'encombrent, n'est-ce pas, ces ados maigres qui ne savent pas que tout a été soldé par Hamelin et moi et que rien ne sert d'écrire encore, ces innocents attendrissants qui nous regardent de travers dans les lancements parce qu'on tend à se parler entre nous, du bon vieux temps, comme si on était des croûtons, comme si on était...

Comme si on était Claude Beausoleil et Lucien Francoeur, quand Louis et moi avions vingt ans, et qu'on les regardait se jaser d'un temps avant nous autres, de partys auxquels on n'avait pas été invités, de nuits de la poésie qu'on ne pouvait appréhender que sur film, alors qu'eux y étaient, de Gatien Lapointe et de Vanier à quatorze ans, de Hubert et de Réjean... Cibole, c'est donc nous maintenant. On le voulait si fort, être eux et pas des gamins velléitaires, et Christ on l'a eu, ce qu'on a voulu, cela et plus, ça s'est passé si vite, comme dans un mix entre une fable de La Fontaine et un conte arabe...

C'est alors, dans ces occasions-là, que je me souviens de Pierre Lemieux, et chaque fois je trouve le goût et l'énergie de parler au sacraman de jeune qui monte. Ché pas si vous comprenez. J'ai de la misère à l'expliquer. En tout cas, c'est ce qu'il m'a donné, et à des jeunes qui ne le connaissent pas, à travers moi.

Cela dit, il a besoin d'une sweet dose de la tribu, et ce M. Vallée aussi. Secouez-les moi un peu.

28.8.08

En construction (Screw Derrida: je ne déconstruis pas)

On n'en est plus au temps des gros beus, et c'est tant mieux. Le grand gros cop était le même à Boston, Chicago, Montréal et Mexico City: il opposait une force bête et brute à une force bête et brute, il poliçait de massifs arrivages de population affamée, il jouait un rôle civilisateur selon l'idée que nous nous faisions de la civilisation. Encore enfant, à la fin des années 1960, je vivais au temps des beus, des interrogatoires menés avec un gourdin de caoutchouc et un annuaire téléphonique, des flics qui fermaient les yeux sur les infractions à la circulation pour le prix d'un journal ou d'une cup de café quotidiens, des jokes de chiens, véhiculées comme eau courante par la population honnête (du genre «Faut une douzième année pour entrer dans la police, c'est pour ça qu'ils en mettent deux par char») : quand on nous ramone avec le bon vieux temps, je n'ai pas l'humeur à rigoler, car c'est un temps fini et bien fini j'espère, qui a fait son temps: le beu, aussi révolu que le télégraphiste et le maréchal-ferrant. Pas un seul policier contemporain, pas même le plus épais taré du plus consanguin village du trou du cul de l'Alabama, ne souhaiterait qu'on réinstaure ce paradigme: le policier est né en même temps que le poète dans le même quartier, ils sont allés à l'école ensemble, ils tripent sur les mêmes actrices au cinéma et ne vont pas à la messe et jouent avec leurs enfants exactement de la même façon. Si on pouvait se figurer ça, autant ces abrutis de poulets que ces tapettes de poètes, si on pouvait s'échanger des services, puisque la police a besoin des poètes et que les poètes ont besoin de la police, que les deux ont besoin de légumes et de disques de Johnny Cash, que tout le monde a besoin d'autre monde un de ces jours pour jeter de la terre sur nous et combler le trou et mettre une pierre dessus, si on s'enfonçait ça dans le crâne, c'est pourtant pas sorcier, y a des malades qui deviennent thanatologues et des dégénérés qui font actuaire et des aberrations de la nature qui deviennent flics et des handicapés sociaux-émotifs qui se font écrivains, et y a des fermiers, aussi, pour les légumes, une belle bande d'illuminés ceux-là, et y a des gouines et des curés des astronautes et des conseillers municipaux, des filles qui tonitruent et d'autres qui la prennent dans le cul en gazouillant, y a de tout dans cette humanité chassée du paradis, juste ici y a des siciliens au teint cuit par les pierres sans pitié de leur patrie même après trois générations de neige, y a des dépanneurs coréens courtois comme un coussin de soie qui empoignent leur bat de baseball et t'éclatent la gueule si t'es un petit braqueur armé d'un automatique penché comme dans les clips et qui veut les douze dollars dans la caisse, y a des romanciers nègres géniaux qui ont commencé dans le taxi et qui pourraient pas conduire une bagnole pour sauver leur vie, y a des canadiens-français ahuris, la lie de l'occident pensant, qui s'imaginent issus de trois trappeurs, deux agriculteurs et une centaine de mythiques et virginales Filles du Roy. Si on les pousse un peu, ils finissent par céder sur le chapitre de la virginité, parce qu'on leur a en effet parlé de gourgandines autrefois, ils savent pas où, ils savent pas quand, et c'est fascinant de voir que ton peuple, six millions et quelques de lascars issus comme toi du dix-septième siècle en Nouvelle-France, préfère penser que ses mères fondatrices étaient des putains et des souillons édentées ramassées dans les caniveaux pestilentiels du quartier des Halles et shippées ici pour procréer, plutôt que d'admettre qu'il descend majoritairement d'indiennes franches, vertueuses et vigoureuses. Vertueuses parce que c'était pas des putains, pas parce qu'elles aimaient pas fourrer leur mari. Les Boomers nous ont tellement farci le crâne avec leurs horribles histoires de curés, de grande noirceur, de joug clérical, pour mieux faire ressortir qu'avant eux le Québec n'était qu'une succession de générations débiles à peine capable de se reproduire en attendant leur avènement, ils nous ont tant bourré le mou qu'on a oublié d'où on vient. Laissez-moi vous le rappeler. Nos ancêtres, ceux qui partirent de France, les troisièmes fils, n'étaient pas le genre de monde à qui on dit quand et qui ou quoi baiser et pour quelle raison et pour combien de temps. On a même oublié l'immensité de notre nouveau monde, et ce dont il avait l'air quand ces gars-là arrivèrent. M'en vais le dire encore une fois pour le bénéfice des obtus créationnistes: les gars ont pas attendu ces Filles du Roy de conte de fée qu'on vous a narrées. Ils ont marié des sauvages, paradoxalement beaucoup mieux léchées qu'eux et qui les dégrossirent à la longue. Ils les ont mariées sans curé, dans le bois, et ils sont revenus chaque saison, et ils furent heureux, enfin je l'ignore, et ils eurent beaucoup d'enfants, ça on le sait, et quand un Jésuite passait il les remariait et il baptisait la sauvage avec un beau nom chrétien et ça c'était votre lointaine aïeule, et la seule chose qui me retient de traiter tout mon peuple d'enfant de putains, bordel, c'est justement que ça l'arrange trop. Mon peuple est un enfant de sauvages! Voilà qui est mieux et dont on peut tirer fierté. On vaut mieux que ces Australiens qui s'aristocratisent astheure selon le plus ancien ancêtre bagnard déporté qu'ils peuvent se trouver ou s'inventer. Parce que même ces râclures de galères de la société Anglaise n'épousaient pas d'aborigènes. Ici, la vérité choquante mais cool est qu'on a fait la révolution française cent-cinquante ans avant Paris, et sans verser une goutte de sang bleu dans la poudre de perruque tombée sous le couperet. On a seulement crissé notre camp. Nos ancêtres étaient des Français que la France faisait royalement déféquer, ils ont décidé de la laisser s'anéantir à coups de langue et de mousquet, de plume et de calembours, et d'aller ouski fait frette et neuf et beau, et vaste et silencieux, nom de Dieu! Histoire de se dégourdir le gras.

C'étaient de sacrés gars.

Vieux motard que j'aimais

Ché pas pantoute comment ça se fait que le blog de Gom est pas dans la liste icitte à côté, j'ai dans l'idée depuis au moins six mois qu'il y est et ça m'a tout l'air que j'ai pensé à le faire mais que je l'ai pas fait, le père Mistral en perd des bouttes, je me sens voleur en plus parce que je le fréquente assidûment ce blog-là, bref si j'étais chez-nous et moins soul je réparerais cette omission: d'ici là, je crisse le lien ici.

Pour vous donner une idée: c'est un des plus chers amis de Big Mac. En partant, on sait donc déjà que c'est pas une moitié d'homme et qu'il écrit intéressant. Mais le bougre ne se contente pas du minimum syndical...

23.8.08

Céline sur le lieu de la Défaite

Les Plaines d'Abraham ont retenti hier de meuglements nasillards dont nous pouvons être fiers. Éric Lapointe agenouillé devant Céline, je n'oublierai pas de sitôt, ni Bigras qui la surplombe en la suppliant de le tuer si elle s'en va. Ferland qui veut battre le record de Georges Guétary (Lambros Worloou) en matière de tournées d'adieu, et Reno qui veut meugler plus fort et plus longtemps que le divan.

Le Graal païen

La posture féérique, la maîtresse tyrannique.

19.8.08

Test

C'était un test, à moult égards, et j'écrirai dessus plus tard, quand toutes les cigarettes seront fumées, toutes les tonsures consommées, toutes les fourchettes tordues et reconstituées comme si de rien n'avait jamais été. Mais d'ici là, avec la permission des principaux intéressés, je peux enfin vous offrir une idée son et images de ce soir-là au Lion d'Or. Le dépucelage public d'une chanson, avec des ah! et des hon! et de vraies émotions avant que la radio ne s'en empare, puis les pharmacies et les supermarchés, puis les ascenseurs et les taxis, puis le métro depuis Laval jusqu'à la station Angrignon, puis la tradition.

Tripe, Tribu.

18.8.08

Labourer l'amour

Aux dernières nouvelles, The Misfits était toujours le film favori de mon vieux Louis. On l'a regardé deux ou trois fois ensemble en vingt ans, et j'ai jamais compris vraiment pourquoi ce chef-d'oeuvre était plus touchant ou signifiant qu'un autre, mais Hamelin étant Hamelin, je n'ai jamais douté qu'une raison existait, et étant ce que je suis, que je la trouverais.

Par ailleurs, je n'ai jamais bandé sur Marilyn Monroe, et pas seulement parce que ses os pourrissaient déjà dans la terre avant ma mise bas. Jean Harlow ne me fait ni plus chaud ni plus froid, pourtant elle fut inhumée vingt-cinq ans avant l'autre, et Brigitte Bardot c'est pareil, qui respire encore. Comme quoi une bobine de celluloïd et un frigidaire jetés dans le vide ne tombent pas à la même vitesse, mais je digresse.



Dans ce film, Les Désaxés en français (ils ne perdront jamais la main, les Français, pour dénaturer un titre), il est question d'un tas de choses dont je n'ai ni l'envie ni la liberté de parler, ce qui était aussi le cas du scénariste, Arthur Miller, sauf qu'il se servit de ces contraintes pour écrire le film.

Quand je retranche la part d'envie et la part de liberté sur ma parole, il en reste encore, les bons jours. Ceci en est un, et voici ce qui reste:

J'ai cherché d'instinct un extrait du film pour répondre à cette femme que j'aime contre toute raison (elle m'avait laissé des pistes cybernétiques odoriférantes comme urine de biche aux coins ronds de la Toile, des appels, et qui donc voudrait aimer autrement que contre la raison?), d'instinct je le répète, parce que rien en Monroe ne m'excite alors que cette femme suscite le vif et le bon en moi, et que ce film en noir et blanc et gris est en teintes qu'elle n'a pas, elle qui est en couleurs, et j'ai pensé que peut-être c'était la figure de Gable qui m'achalait la mémoire, et oui, c'était un peu ça aussi, mais surtout...

Surtout, j'ai réalisé qu'il y a Cynthia dans le personnage de Roslyn Taber, celle qui insiste en pleurant pour que Gaylord abandonne ses laitues aux lapins plutôt que de tuer les lapins. Et il y a Kevin dans l'incompréhension de Gable, qui voudrait un peu de respect aussi pour ce qu'il est, lui, et qui n'est pas un lapin. Et là, il y a moi, qui ai compris Louis, et qui me suis senti comme ça aussi, souvent, sans jamais le sens de l'écrire ou d'en parler, ni même de m'en rendre compte.

A la fin, le plus important de tout a surgi. Je n'avais pas erré dans mon esprit en songeant à la femme de mon coeur en conjonction avec ce film. Je n'avais pas d'emblée réalisé pourquoi elle m'y faisait penser...

Entre elle et moi, la langue a toujours été très près du coeur et du cul, et quand nous en usions pour parler, il arrivait que nous recourions à l'anglaise. La langue anglaise offre un mot, feral, qui lui est exclusif. Aucune traduction ne lui fait justice. Et ce mot est le nôtre, à elle et à moi, pour toujours grâce au plaisir et la complicité qu'il nous a procurés.

Les chevaux, métaphoriques de l'humain moderne, qui sont capturés dans Misfits ne sont pas des mustangs. Pas des chevaux sauvages. Ce sont des feral horses, retournés à la nature après un passage par la domesticité. Ils me plaisent davantage que les innocents sauvages et me paraissent autrement plus dangereux. Kunta Kinte avait appris l'anglais et l'hypocrisie nécessaire à la survie quand il fallut lui couper la moitié du pied. Le cheval feral refuse d'être ferré, et il faut se lever tôt pour l'expédier à la fabrique de colle...

Elle, c'est le cheval. Feral. C'est Roslyn qui parle sans réfléchir et sans calcul et qui gâche en proposant de le payer le cadeau des cinq chevaux que Gaylord allait lui offrir, voire se donner à lui aussi. C'est aussi Marilyn Monroe ayant la peau de Clark Gable dans le désert du Nevada à force de folies: il s'est traîné jusqu'en Californie et a claqué douze jours après la fin du tournage. Même Scarlett O'Hara n'avait pu faire tourner Rhett Butler en bourrique comme ça. Ni la tragédie de perdre Carole Lombard ni ses missions aériennes en pleine guerre ni ses trois paquets par jour durant trente ans n'avaient eu raison de lui. Il fallait Monroe. Pourquoi n'a-t-il pas quitté le Plateau? Il pouvait pas plus que moi, je suppose...

15.8.08

Intense vieille joie

Passé la soirée au Bunker avec Kevin. À qui se demanderait pourquoi mon blog manque de dynamisme et de substance vitale depuis qu'il ne vient plus, eh bien, c'est parce qu'il ne venait plus.

Please, une loupe.

Mon assistante me fait part d'une proposition: des bumper stickers that read Let Misty be Misty!

Tentant, mais je déchiffre pas les petits caractères du contrat, so please, une loupe.

Montréal-Nord (suite)

Ensuite de ça, créons une vraie police communautaire d'urgence, une escouade spécialisée, menée par un de ces superflics hyperinstruits bardés de doctorats dont on nous dit qu'ils existent et qui finissent toujours par se présenter à la mairie de Montréal. Qu'il établisse un vrai rapport avec la communauté et que la presse lui crisse la paix pour au moins un an. Que cette police soit constituée d'hommes aguerris et mûrs, pas des bleus qui dégainent sous l'insulte et pas des femmes de cinq pieds six qui se font saisir à la gorge quand elles roulent des mécaniques. Que cette police agisse avec une ferme bienveillance, qu'elle ferme les yeux sur le Yo qui crache sur le trottoir, et qu'elle aborde chaque citoyen avec respect en le vouvoyant, le temps de voir s'il se mérite une balle dans la gueule. Que les citoyens du quartier se sentent protégés et ne craignent plus d'appeler la police.

Un quartier en santé ne repousse pas les pompiers à coups de pierres quand les incendies ragent. Les pompiers ne l'ont pas dit, pour ne pas jeter de l'huile sur le feu, mais c'est la faute du climat policier, et c'est sérieusement menaçant.

Montréal-Nord

Commençons par en changer le nom. Qui veut vivre et prospérer dans l'adjonction d'une entité? Surtout pas des jeunes hommes pleins de talent et de testostérone. Saint-Léonard et Saint-Michel sont surgis de rien sinon les efforts d'Italiens travailleurs à qui l'opportunité de construire était offerte. Oui, la Mafia aussi. Ça en a fait partie. C'est pas grave.

Changeons le nom de Montréal-Nord, calvaire, parce que plusieurs l'appellent déjà le Bronx, voire Montréal-Noir. J'ai mon Plateau, vous avez votre Mile-End ou votre Parc-Extension ou votre Faubourg à m'lasse ou votre Petite-Patrie, je vous en prie n'insistons pas monsieur le maire pour que ces gens s'identifient par un nom satellitaire.

Villanueva: encore (et j'ai pas fini d'en parler).

Il est un autre motif au fait troublant que tous les témoins et participants à la mort de Fredy V soient déjà interrogés, sauf trois (les policiers, parce qu'ils sont policiers, et Fredy parce qu'il est mort). Les Yankees appellent cela contaminate the jury pool. En l'absence de déclaration de celui qui a tiré et de sa compagne, en l'absence de déclaration de leur fraternité ou de la SQ, en l'absence de tout et en présence de rien sauf les efforts de journalistes et la discussion qui s'échauffe en blogosphère, chaque minute qui passe fait peser la balance vers la sainte innocence de nos preux chevaliers bleus et l'éloigne de ces sales nègres avec des patronymes hispaniques qui se croient libres de jouer aux dés comme ça au Parc Henri-Bourassa sans qu'on leur tire dessus.

Mot du vendredi : émétophilie.

Le cœur d’un homme est une longue et vaste table de banquet qu’il ne lui est pas donné de faire rase, ni dans le regret, ni dans la détresse du désespoir, ni dans le désir de renouveau, pas même lorsque le temps use sa mémoire et sa raison et le rend pareil à un petit enfant : les reliefs du repas de sa vie demeurent, fantômes de miettes et de meules entamées, de vins tirés et bus, de venaisons fumantes et de riches sauces désormais anonymes et mélangées les unes aux autres.

Mais il est, autour de la table, des places qu’occupèrent telles femmes, parfois assises, souvent allongées, à genoux ou érigées sur de hauts talons, des places désormais vides et qui le resteront, et bien que cela soit triste comme un grand soulagement, il nous revient aussi que les Romains n’ont jamais vraiment eu de vomitorium attenant à la salle à manger, et que l’Histoire est souvent mensongère.