18.5.02

kevin oisif au sang tout ce travail toute cette peinture créative et d'entretien toute cette construction de son site et tout ce temps qu'il me consacre tout cela n'est rien en regard de ce qu'il faut qu'il accomplisse pour lui-même confronter le réel ingrat le soumettre et lui tordre le bras le réel et puis l'apprivoiser le réel avec des mots concrets des principes entiers des effets de manche et du sucre s'il faut car il faut ce qu'il faut et cet homme doit cesser de fuir les exigences de sa jeunesse vitale tout l'avenir écrasant somptueux qui s'ouvre à son talent ce haut mât de cocagne érigé devant lui oint de graisse de porcelet et au sommet duquel sont suspendues les récompenses de ce monde il n'est pas bien que ce gaillard vive si tôt la même vie que moi redescendu du mât je lui nuis je lui donne à croire que n'existent plus les marais de souffrance et les cloaques de solitude et l'effroi dur et le dégoût mou de soi pour moi ce bunker sage et sécure est l'aboutissement d'une longue violente usure pour lui c'est le début et c'est mal.



o' que je pastiche ici avec plus ou moins de bonheur lui a écrit enfin et tout me porte à croire que c'est très joli qu'il n'a rien perdu pour attendre. Il plane il cogne des clous il consent finalement à dormir c'est plus compliqué de le mettre au lit que de l'en tirer il marmonne réveille-moi quand il sera temps à temps je veux dire à temps pour qu'on passe une journée qui nous ressemble...



je le rassure d'accord une demi-heure.



ses yeux s'arrondissent il pouffe tout rouge épuisé il s'allonge en sécurité sur le sofa mauve qui prend décidément la forme de sa vigoureuse carcasse il répète une demi-heure une demi-heure elle est bien bonne.



hier il parlait d'un job de travailleur de parc ça consiste à s'asseoir sur un banc de square de treize heures jusqu'à vingt-et-une et à s'occuper des jeunes délinquants et le coeur m'a manqué car enfin qui s'occupe des vieux délinquants? mais bien sûr ce serait excellent qu'il travaille qu'il nage de cette session universitaire vers la suivante comme s'il s'agissait d'îles de ses chères Îles et l'été est un océan sirupeux plein de pièges de subtiles sirènes d'agaces-pissette de soupçons intimes de crises de coeur de crises de foi je suis conscient de chipoter comme une tapette ou une mère-poule mais est-ce ma faute si mon fils n'est pas là pour subir le surplus passionné de mon anxieuse affection? je suppose que ça l'est quand on y pense.



ce soir k me lit tout aussi fasciné que séduit un passage de tropique du cancer cependant que je grince comme une porte de grange à la vue des ficelles faciles que miller tisse trame tresse je le sais je le fais mais je me serais si bien passé de prendre henry en flagrant délit de tricher je me serais contenté comme je le fais depuis quinze ans du souvenir de mes éblouissements mon dernier dieu titube et tombe et c'est ce jeune prodige qui lui fauche innocemment ses pieds d'argile c'est justice je suppose je suppose je suppose.



ensuite je lui lis quelques pages de vamp et il est pris d'un soudain très pénible hoquet.



presque trois heures annie écrit qu'elle a eu froid plus tôt ce soir satin et soie dors bien mon ange en miel dors dur somnole tiède mon délicat chaperon rose pense à ton loup ton loup-marin grand méchant loup-marin dentu qui te phoque sweet qui te phoque doux..



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