Recouché, relevé. Kevin chante: «Quel beau mystère, quel chant joyeux, Paix suuur la Terre et dans les Cieeeux!»
Rêvé de lui, sa soeur et Catherine. Dans le rêve, c'est sa soeur qui est écrivain et pas Cat. Or, voilà-t-il pas qu'il a rêvé de nous aussi: s'en allait faire un mauvais parti à un type qui avait manqué de respect à sa frangine quand il me vit traverser le champ à sa rencontre au ralenti dans mon duster noir. Western.
Voilà. Il l'a rêvé il y a à peine dix minutes et c'est déjà publié; quelqu'un en France, à en croire mon compteur, est en train de le lire. Kevin dit: «T'imagines-tu le trip que Breton et ses potes se seraient payé avec un bidule pareil?»
Il dit aussi que si les observateurs internationaux visitent les prisons de Cuba, ils seraient bien avisés d'inclure celle de Guantanamo Bay. «C'est la pire de l'île!»

Monotype 5
(© Kevin Vigneau 2001) Kevin Vigneau m'a fait cadeau de l'original de ce tableau, ce monotype, numérisé ici en noir et blanc. Je l'ai accroché tout de suite. Sa composition est parfaite, sans parler de l'effet qu'il me fait. Il me rappelle que vivre d'art, de livres, de vin, de tabac, d'omelettes au mozzarella, de l'amour d'une jolie femme et de l'amitié de deux ou trois bonshommes est un insondable privilège.
On regarde un documentaire sur les exactions de la CIA. Me reviennent les mots de ma mère: «Les Américains sont devenus riches en se mêlant de leurs affaires.» Où diable est-elle allée pêcher ça?
Grand-mère disait:«Coeur qui soupire n'a pas ce qu'il désire, coeur content soupire souvent.» Celle-là non plus, je la comprends pas.
Maman, encore: selon les circonstances, elle me servait soit «Et si ton copain se jetait du haut d'un pont, tu le ferais aussi?» ou alors «Si cent soldats marchaient dans une direction, tu marcherais dans l'autre!»
Je m'étonne vraiment de ne pas être plus mêlé que ça.
Rien de particulier. C'est, en soi, particulier. Je sape ma soupe en regardant la mouille froide cingler la ville cependant que Kevin, le nez en l'air, compte sur ses doigts les femmes qu'il a lues. Il est bloqué à cinq.
Kevin se tient les côtes, il hennit ce salaud à force de se foutre de moi, il dit: «Quoi? QUOI?»
Je répète: Annie avait un mignon bouton au milieu du front et je lui ai dit qu'elle s'était déguisée en hindoue.
«T'es fou? Elle était... enfin, tu sais bien... elle était visitée par les Indiens, quoi! Il leur sort des boutons de partout, ces jours-là, grands dieux, il faut pas...»
«Je sais, je sais, il faut pas en parler, sauf que j'y ai pas pensé, j'ai pas pensé à mal, j'ai dit la première affaire qui...»
«Qui quoi? Kesta dit ensuite?»
«J'y ai dit le truc du dentifrice.»
Il s'est levé, il a hurlé (de rire dubitatif): «Le truc du dentifrice?!»
«Ben, ouais! Ça fonctionne! Les top models s'en servent! T'as un bouton, tu mets de la pâte à dents, y sèche, y tombe!»
Là, Kevin, il se tenait les côtes flottantes, il bramait de rire à mes dépens. «Ta blonde, elle utilise des savons Druide, Christian! Ça vaut trois piasses le pain! Du dentifrice, franchement...»
Je m'empoigne le crâne, le frappe trois fois sur mon bureau. «OK! OK! Lâche-moi...»
M'ennuie.
Me tape le canal météo. Précipitations mouillées pour demain, cocotte.
Sur le Forum, y a un abonné qui s'appelle Pastis et qu'en a marre de causer tout seul. Cherche quelqu'un pour s'ostiner. Semblable abjecte solitude me fait peine. Allez, quelqu'un, un bon geste: je vous demande pas d'aider un vieillard à se laver ni rien. Gagnez votre ciel, peuchère!
Même pas midi, déjà je m'offre une sieste grasse. Chanson finie, l'effort de vie se récompense par une ration d'inconscience.
Je planche sur un texte de chanson, une ânerie pour une interprète velléitaire qui me l'a demandé et à qui je n'ai pas le coeur de dire qu'elle n'arrivera vraisemblablement jamais à rien. Me croirait-elle, de toute façon? Bien sûr que non. Alors elle l'aura, son texte, son démo et son désenchantement. Je suppose que c'est encore préférable au regret de n'avoir jamais rien tenté.
Regarde Le bûcher des vanités. L'avais lu à Parthenais, en préventive, à l'ombre, tandis que ma carrière tombait en cendres au dehors. Sherman McCoy se croyait sans un ami au monde. En cela aussi, il se trompait.
Plein de dumplings et de canard laqué.
Croisé Hans, hors d'haleine sur son vélo, une jointure écorchée. S'est remis à la boxe.
Croisé Véronique et sa bergère allemande bébé. Véro, danseuse exotique, amatrice de matelots et seule femme en ville à pouvoir me faire rouler sous la table à coups de tequila.
Ma sweet Annie a les lèvres engourdies...
Ajouté quelques clichés à ma tribu en photos. Vais flâner dans Chinatown avec Annie tandis que les grévistes s'amusent à cisailler les câbles de fibre optique.
Y en a plus que marre. Le câble me lâche à répétition. Je me fais l'impression d'être un cadre qui lutte vaillamment pour sortir le journal malgré le sabotage et les piquets. Ou peut-être un scab. Le pire, c'est quand la grève devient le sujet. Heureusement que je m'en tape, du sujet.
Réveillé (encore) par une (fausse) alerte d'incendie. Comme une grande pulsation stridente du building. Quel extraordinaire moyen de rencontrer mes voisins, si j'en avais la moindre envie!
Mario est passé en début d'après-midi. J'ignore pourquoi au juste, mais j'ai cru comprendre que c'était pour tousser sur mes meubles. En tous cas, je lui ai fait de la soupe et lui ai refilé des Halls mentho-lyptus. Il a dit: «La dernière fois que j'ai lu ton journal, tu racontais que je t'avais apporté du papier de toilette. Bon Dieu, ils diront pas que t'évites les vrais sujets!»
C'est toi qui m'a refilé l'idée, j'ai dit. Les contingences de l'écrivain et tout ça. Viens pas te plaindre maintenant.
Ajouté une chanson inédite au site, pour remonter Annie qui souffre d'un gros mal de partout. Écrit ça pour Louise Forestier en 1990. Projet avorté.
Aussi une page de liens, Liaisons dangereuses,accessible à partir de celle-ci ou de Vacuum.
Saloperie de grève à Vidéotron: mon modem flashe pire qu'une disco. Bien envie d'aller voir s'il fait beau chez Bell; paraît qu'ils sont mucho sympatico. Et combien vous pariez que la facture de ces enfoirés va se poser comme une fleur au jour et à l'heure dans mon pigeonnier?
Une joke de K: c'est un petit Madelinot qui entre en trombe dans la cuisine. «Maman, maman, j'ai vu deux airplanes!»
Sa mère le tance vertement. «Kevin, tu sais qu'il faut dire avions. Allez, recommence et fais attention.»
Le gamin, penaud, s'exécute de mauvaise grâce. «Maman, maman, j'avions vu deux airplanes!»
Bon, eh bien, maintenant que vous êtes détendus, TAM TADADAM! Je suis autorisé à révéler l'URL du site de Kevin Vigneau. LIBER est très spécial et très beau, je trouve. Comme dit O', «Il écrit bien, le bougre!» Et un rapide coup d'oeil révèle qu'il ne peint pas que des salles de bains.
Carole David est une douce et vieille amie. Pour une raison ou pour une autre, je ne me suis jamais montré tout à fait à la hauteur avec elle. Quoiqu'il en soit, elle appelle ce que je fais le pari du journal. Perspicace en diable. Sans parler qu'à force de lire entre les lignes, elle finira par me donner l'impression de doubler ma production!
Quand Dominique est venue mercredi, c'était les bras chargés de cadeaux: son livre d'abord, plus quarante-huit bouteilles de bière "pour mes ouvriers" (Kevin, en l'occurence) et des certificats pour vingt-quatre autres. Ce soir, je passe à travers la Heineken, mais j'ai pas le coeur à la luxure.