29.12.07

Soleil de nuit

Reçu ce titre de Prévert en cadeau de Max. Prévert, je lui dois d'avoir fait aimer la poésie à mon fils. Je m'y plonge. Les sphygmomachins peuvent atttendre; d'ailleurs ça se vend tout seul.

Me reste à recevoir mes exemplaires de la revue La Compagnie à Numéro.

Chercher des pouls

I'm dropping the litt racket. Trop stressant. Astheure, je vends des sphygmomanomètres. There. Y en a marre. Merde. Sphygmomanomètres, anyone?

28.12.07

Crazy me

I miss her ass. I miss our talks and I miss our chats. I even miss our fights, and I miss the making up. I'm the one who should be locked up in the loony bin.

Crazy Duck

Reviens de visiter le canard. Lui ai apporté des livres. Le vert hosto lui va bien. À l'évidence, il n'est pas plus fou que vous et moi, ce qui, convenons-en, n'est pas le plus incontestable des certificats, mais bon: à la BAnQ, il y avait des gars qui parlaient tout seuls en faisant du taï-chi près des rayons de géo-politique.

Le moral est bon. Il sait que la Tribu se soucie de son sort et appelle à sa libération. Ça lui fait du bien.

Free the Duck!

27.12.07

Sauver des vies


Y a un truc qui peut sauver des vies, surtout dans le sinistre temps des Fêtes. C'est ce comm de Gom.

Répandez-le autour de vous, si vous flairez une jeunesse en détresse. Leur acheter du temps pour jongler, c'est tout ce qu'on peut faire peut-être, mais peut-être que c'est assez.

And, oh, by the way:

FREE
THE
GODDAMNED
DUCK!!!

Schürch


Sa face n'a pas changé des masses depuis que je l'ai rencontré à Brébeuf. Il avait dix-neuf ans. Ou dix-sept? Je sais plus. Il a quelques froncements supplémentaires au front, mais bon, il n'a jamais été du genre insouciant. Toujours aussi laid, ça c'est sûr...

J'ai arrêté la poésie pour ce type-là. Parce qu'il l'écrivait mieux que moi. Il était la suite, l'avenir, la salvation, et je me suis assis en le regardant partir avec le flambeau.

Et il a fini par publier, de superbes vers, que personne n'a compris, mais il a livré sa part de rimes (façon de parler; la rime: pas son truc).

Now what? NOW WHAT? You want great poetry, ask him, not me.

Ou à Max. Pas pire, so far, Max.

Vigneau? Il a pris sa retraite.

Stan the man

Reçu ça à l'instant d'un membre de l'UNEQ qui requiert l'anonymat.

Où le diable d'homme trouve-t-il l'énergie de se démultiplier ainsi? Travailler pour tout le monde et le Père Noël en même temps, le tout sans conflit d'intérêts? Je l'admire encore plus que je le déteste, c'est très embêtant...

Paraît qu'il se félicite d'entretenir de brèves mais passionnées relations avec mes ex, durant lesquelles il leur demande de parler de moi. Je vois ça d'ici. Stan haletant (bref mais passionné, remember?): «Come on, baby, talk Misty to me!»

Stan the man.

26.12.07

L'esprit de Noël

Sex was great, mais on s'engueulait tout le temps. Malheureux comme les pierres. Temps que ça cesse.

Max me fournit la dernière pièce pour mettre un terme à cette affaire. Et aux délicats qui me mettraient sur le dos de rendre publique une affaire privée, je signale que j'étais au chaud chez moi quand cette affaire a commencé, en public.

Je suis dans ma famille pour Noël, j'essaierai de t'écrire au retour sur ma version de cette soirée. Une chose est sûre, je ne pense pas devoir porter l'odieux, et je pense que tu le sais. Mon erreur, au final, aura été de me présenter fin soûl au Cheval Blanc, donc complètement manipulable. À moitié inconscient, je dirais. Pas mangé, trop bu, j'ai payé en effet une bière à ce cher Bastien, c'était un genre de fin de soirée agréable.

J'ai décidé de partir, me suis levé d'un bond. Elle a suivi, je pense n'avoir rien dit. J'ai finalement dit quelque chose quand on était rendu dans mon entrée pis ça s'en venait sérieux. Wo bec. On prend un dernier verre pis moi je me couche.

Merci de pas avoir cité mon nom de famille sur ton blogue. C'est au moins ça. Ma blonde trouverait ça faible de ma part, cet engrenage dont je me suis tiré in extremis. Si cette femme me quitte, je ne sais pas ce que je ferai. Donc, en te demandant pardon pour ma faiblesse envers cette histoire entre toi et elle et elle et Mac... je ne te demande rien, en fait. Je ne comprenais rien à son truc, j'étais fin soûl, et j'ai surtout trouvé bizarre qu'elle se jette dans mes bras dès mon arrivée à la librairie de Bruno, comme si on était de grands amis.

Enfin,

pardon,

Max


No problem. Quelqu'un veut en rajouter une couche? Sinon je passe à autre chose.

25.12.07

Libérez le canard!

Le canard est enchaîné. J'élaborerai dès que ce sera prudent. En attendant, on garde ça entre nous (la clique)...

24.12.07

Set things clear.

The girl wishes to set things clear. Now that she's back in her mama mode up there in the country, she does sound so sane, big-hearted and altogether innocent, doesn't she? No dope, no booze, no literary types to try your waning charms on, or grab their balls if that doesn't work, and no wide back to climb on, no name to drop, just peace and maternal bliss.

Now it's an easy enough thing to chart her progress since she first targeted me, and easier still to correlate each and everyone of her droppings in my town with some kind of trouble she made for me. But that can wait, since it doesn't make for very exciting reading. No, I think I'd rather set things clear, too. I mean, it's gonna have to get done, and after I've slept a while, I'll fucking get on with it.

Set things clear, indeed...

Visiteurs à la vanille

Trop, décidément, de visiteurs à la vanille, ici. De conseillers conjugaux en cardigan, de fonctionnaires du sexe épanoui-respectueux-et-sain dans une optique d'écoute active, de zombis sociétaux bodysnatchés par les métastases de Corneau et les fuites mammaires de Janette et le généreux caca mental épandu par Passe-Partout de bord en bord du champ psycho-cul.

Trop de kids de vingt ans qui ont peur de mourir en baisant: ils feignent tous de ne pas croire en l'amour et s'en persuadent mutuellement, participant à la joie des nouveaux prêtres, du clergé pomo qui ne dit pas son nom, cependant qu'ils ânonnent leurs leçons incrustées avec l'aplomb d'un Lacordaire et la détermination d'un zouave pontifical.

Athéna, komboloï, Old(er)Cola

Oui, je crache aux yeux de tous et je pisserais même pas sur un ami s'il était en feu, c'est ma nouvelle église.

Mais Antoine, c'est pas pareil. Quoiqu'il vous raconte pour vous emberlificoter et vous bourrer le mou, il a quarante-huit ans aujourd'hui, Athéna veille sur lui et j'ai fait livrer six tourtières du Lac-Saint-Jean à Athéna.

Back to hate, now. COME ON, FUCKERS!!!

Bastien Leboeuf, Mark Felt, Linda Lovelace et moi.

Deep Throat a mis plus de trente ans avant de se dévoiler, et encore, il était gaga: «Nixon? Nixon qui?» Mais Woodward, Bernstein et Bradlee se sont tus...

On n'est pas tous de vieux espions jaloux. Joseph-Daniel, par exemple: comme de juste, cette tête de linotte surexcitée s'est dénoncé lui-même en moins de temps qu'il n'en faut pour dire Star Académie. À quoi bon protéger des gens comme ça? Il trouve que Meth est un aimable génie. Elle croit que Big Mac va l'épouser. S'imaginent qu'ils existent si quelqu'un d'autre écrit sur eux. M'a-t-elle assez purgé avec ça! «Vas-tu écrire sur moi? Si jamais t'écris sur moi...» Ben voilà, conasse: j'écris sur toi.

Le Basduck, puceau wiseass, quand il ne se mêle pas de me dire comment écrire ou de chiendepocher langue-à-terre autour des filles que je fourre, y va de sa voix aimante mais ferme, au timbre de virilité inimitable:

Je me demande comment ça va se terminer. Sûr, en tout cas, que Mistral restera pas fâché contre elle; il peut pas. Ni contre Max, d'ailleurs; ni contre moi. Il va devoir... cesser de fréquenter Meth ? La jeter à l'extérieur de l'espace mythique? Comme si c'était possible !

Je me demande ce qu'il va devenir. Je serai là pour le supporter dans cette histoire. J'espère qu'il va se porter bien. À Noël, en plus... sniff !


Eh ben, eh ben. Come on, fuckers.

Mistral said...

Ben, aux dernières nouvelles, l'espace mythique était autour de moi, pas dans la librairie de Bruno Lalonde ou sur le sofa de Max. Je suis fort capable de jeter n'importe quelle bougresse hors du cercle.

Tu te demandes ce que je vais devenir, mon pit? Tu devrais pas plutôt vaquer à perdre ton pucelage?


Come one, come all. Me no love no one no more.

La LeBlanc n'a rien trouvé de mieux, de plus couillu que s'en prendre à Bastien sur le blog du kid, via le post qui l'éraflait: usant de pitoyables allusions sexuelles et picorant son intégrité, glissant subtile comme un narc qu'il avait fumé DE LA DROGUE, bref étant elle-même, débordée à discréditer quiconque la reconnaît pour ce qu'elle est, même un étudiant de vingt ans, et bien timidement, encore, lâche et sournoise, cooptant un backup anonyme et brutal, paladin des ombres qui sentait le cognac, et en avant sur 84 commentaires que je te brasse du jeune, et en avant que je m'en moque parce qu'il m'identifie pas sous le stress des menaces, et en avant que je lui laisse penser que Mistral est là-dessous. Sacré justicier, en effet. Battre un jeune gars en portant cagoule pour épater une pétasse aux lèvres souillées. Ne surtout pas venir chez moi, essayer la même chose. Se tirer vite fait en se dissimulant derrière des Subaru gris-perle. Gagner quoi? Une photo nue? Une déclaration d'amour? J'en ai à jeter par le châssis, les plus fraîches de dimanche dernier, en veux-tu, je t'en donne!

Fortunément, right? la foudre est tombée sur toute cette merde et ne restent que des cendres fumantes qui sentent la couardise arrosée de cordial.

Lettre d'un ami qui m'accusait de le trahir si je ne la publiais pas.

Il n’en est pas toujours des femmes comme des hommes, heureusement, et celle dont il est ici question doit chercher sa place quelque part entre le domaine de l’hystérie et le royaume de l’inconscience. Après avoir voulu baiser ma femme, elle me voulait moi, le tout pour mettre en rogne un homme dont la fidélité n’est pas à discuter.

Il en est des femmes comme des hommes, malheureusement, pour ceci : l’intelligence confine parfois à la connerie, et si mon ami a su voir les bribes de hautes volées dont la créature était capable, c’était sans supputer la bassesse intrinsèque qui est celle de cette fendue.

La seule issue honorable pour ce genre de gourgandine, c’est le silence, parce que, Mélissa, tu n’es pas de taille, quoique toutes tes machinations soient de telle nature qu’elles visent à nuire à un être qui m’est cher. La manipulation, le passif-agressif, j’en ai soufflé, et même par la lecture de toi, je me vois aux prises avec ce que je considère comme un restant d’humanité : l’amant, l’ami, il l’a été contre l’avis de son entourage entier; le père, il l’a été aussi, mais mon frère vaut trop pour ton enfance.

Je m’en viens ici te dire, sachant d’expérience que tu n’entendras rien, d’aller traîner ton envie de lucre littéraire ailleurs. Tu remues des forces bien au-delà des tiennes.


Kevin Vigneau

23.12.07

Lettre d'un ami que je trahis en la publiant, me trahissant aussi, tous mes principes et mes préceptes, crissant d'un swing mon auctoritas aux orties.

Yo.

Je te raconte comment ça s'est passé.

Je suis arrivé à 19h30 avec mon ami de Cégep. J'ai vu Meth sur la galerie. J'ai pensé à retourner, en fait, j'ai cru le faire; mais, je l'ai pas fait. Principalement à cause de mon ami qui rentrait se faire du fun; à cause que Meth m'offrait de la pipe et que Max serait là. Je voulais la revue, aussi, d'ailleurs.

Je suis resté parce que la soirée était cool. Ça se passait bien, j'ai cru pouvoir me rendre utile. J'ai pensé à toi. Je savais pas quoi faire. J'ai laissé Mélissa faire ce qu'elle voulait.

Ipso facto je me suis rendu utile; ne serait-ce qu'en étant une figure rassurante qui la laissait pas faire de conneries. Léa aussi, d'ailleurs, a pas joué son jeu. Je sais pas pourquoi. En tout cas, c'est bien la seule. (mon ami non plus, d'ailleurs; semblait pas l'attirer. Elle est quand même sélective; hum...)

J'ai été traumatisé, je t'avouerai. Je savais pas trop quoi faire; sinon quoi NE PAS faire.

Aussi, j'ai pas pensé qu'elle sortirait avec Max ; je l'idéalisais encore un peu. Je le fais toujours, d'ailleurs. Comme Meth. Sont d'aimables génies; comment je pourrais leur en vouloir ?

Je vais te dire comment. J'ai trouvé qu'ils avaient mal agi. D'abord, Meth, en se frottant à tous; en disant qu'elle avait cassé; en pensant que ça ferait plus de différence. Elle dit être amoureuse de Big Mac; elle faisait des projets. Ce qui est bien, au fond. Ce qui est moins good pour toi. Je comprends pourquoi tu l'aimes.

Écoute, j'ai pas la prétention d'avoir du génie mais je peux te dire (te demander?) d'arrêter de coucher avec; question que ce soit plus facile - brrr...

Sinon, pour ce qui est de Max, c'est un « aimable génie », cela va de soi. Il m'a même payé une bière. J'ai eu l'impression qu'il était là pour ça; je l'aime beaucoup, Max...

Ben, alors? J'ai pensé que dans un cas comme dans l'autre c'était mieux pour tout le monde qu'ils sortent ensemble; question que tout le monde avait à apprendre la leçon qu'ils ont appris, au fond.

Je suis jeune mais j'ai les yeux brillants; j'ai pas su quoi faire avec ça. Ok? Qu'est-ce qu'il fallait que je fasse? Je veux dire, je sais pas..

Moi, j'ai pensé aller les voir pis leur dire que c'était pas correct; voir, de leur interdire de faire ça; prétextant que c'était pas correct pis que Mistral serait déçu de l'apprendre (cachant moi-même ma déception).

Anyway, je comprends pourquoi tu l'aimes.

Ben, je le dis : nous sommes tous cons.

Je suis pas déçu, dans le fond. J'ai une agréable confiance. L'espoir qu'ils vont apprendre.

Bon, et j'insisterai pas sur ton compte, ok? Jamais.


Et c'est signé, mais je suis novice dans la sodomie d'amis et j'ai assez trahi pour aujourd'hui: sa signature, on l'aura pas, ni les cruchons chargés de la sécurité dans les corridors du Web parce qu'ils ont échoué à faire flics ou même screws, ni les écornifleux, ni les velléitaires qui s'imaginent arrivés avec un contrat d'édition, ni les ambitieux aux molles gonades. You can all go drown in the putrid cesspool you've wished this world to become.

Come on, fuckers!

I'm ready. Me loves nothing and no one no more. I spit on my own blood, I take a dump on the french language, I piss on literature and friendship can suck my balls. Come one, come all, I'm ready to betray, I'm ready to cheat and hide, I'm ready to grab and run, I'm ready to swing this dead cat at the world! You want me out, come and get me, come on, fuckers, you don't have to take sides anymore, I've done it for you: see me there? You're on the wrong side!

I lost faith in God about twenty-five years ago, and that was a tough one, still hurts, but I could live with it. Now, when a man loses faith in Man, how’s he supposed to live with that, and can the world live with him? I foresee all kinds of unforeseen dangers...

I'll make your very names bleed. Come on, fuckers, daddy's waiting! Come before I go after the whole cowardly lot of ya!

Mélissa

J'en ai mon crisse de char de ses zigonneries. La cocotte va découvrir les vertus régénératrices de la vérité. Fini de la protéger. Chuis en train de la protéger jusqu'au brouillage avec un ami cher, et elle s'est arrangée pour en rencontrer d'autres hier. Ca va faire le niaisage! Ma blonde qui n'est pas ma blonde, no more!

Va y avoir la pluie du ciel maudit qui lave les crosses betôt! La sentez-vous? On me pendra par la poche avant que cette putain débarque en ville et se serve de moi pour s'immiscer en deux mois dans vingt ans de relations sociales. Et je vais ajouter un aveu: oui, la clique existe!

Hate speech

I think I hate just about everybody I love just now, and everybody that loves me hates my guts too. Fucking Christmas ain't even here yet, but wait and see what I can do from here to Boxing Day. There's gonna be fluids spilled on the goddamned cyberfloor.

Les seuls anonymes que j'aime


Les Souverains Anonymes. Et celui qui les anime, qui travaille à leur redonner leurs noms, depuis 1990 : Mohamed Lotfi.

Extrait de la dernière émission de l’année. J’ai pas la cruauté de souhaiter Joyeux Noël aux gars, mais Bonne Année, c’est indiqué, me semble…

Noël en prison, c'est rough en tabarnak. C'est beau, aussi. Même les screws sont plus doux, et il règne un silence quasiment recueilli dans les wings; les gars ont droit à quelques gâteries, mais ce qu'on sent surtout, ce qui suinte, même à travers les murs épais de Bordeaux par exemple, c'est ce silence lourd et privé, quand chacun pense à sa famille en même temps, celle d'aujourd'hui parfois mais rarement, le plus souvent celle d'autrefois, jamais celle du futur, ça fait trop mal...

Les honnêtes gens s'en crissent tant.

22.12.07

New hot hat/Nouveau chapeau chaud


C’est arrivé jeudi soir, vers vingt heures, et je n’ai pas trouvé les mots depuis pour en parler ici.

Ça frappait comme un huissier à l’huis du Bunker. À la troisième salve, j’ai répondu. C’était un messager porteur d’un sac-cadeau, avec des rubans frisés multicolores. Je suis retourné à mon chitchat coquin avec une délicieuse et j’ai dit que je venais de recevoir une bombe ou un colis d’anthrax.

À la vérité, j’aime me faire attendre, pour le sexe, la bouffe ou les cadeaux, ce qui revient au même. À la fin, n’y tenant plus, j’ai ouvert le paquet…

C’était une boîte de chez Henri Henri, chapeliers, maison fondée en 1932. Mon grand-père y achetait ses fedoras déjà à cette époque, moi-même depuis 1982, et j’y ai emmené mon fils dix ans plus tard. Et elle le sait.

Elle, c’est Soft. J’en ai parlé ici à mots couverts il y a quelque temps. Tout a toujours été couvert dans notre affaire, circonstances obligeaient, et voici qu’elle m’offre ce feutre magnifique, couvre-chef princier, qui vaut une fortune et témoigne des richesses de son tendre cœur. Rien n’indique d’ailleurs qu’il vienne d’elle, sinon ce poème/chanson glissé dans la boîte, qu’elle m’écrivit le 2 juillet 1998, qu’elle ne m’envoya jamais et que je ne garderai pas pour moi.

Je te retrouverai

Dans le journal hier une photo
M’a ramenée en arrière quelques années plus tôt
Tu portes encore, je vois, ce vieux chapeau
Et ce sourire canaille qui depuis m'a manqué
Bien plus qu’on ne pourrait imaginer

Dans la rue un beau matin
Je te retrouverai
Ou bien dans un refrain
Je te retrouverai
Je te retrouverai
Je te retrouverai
Je te retrouverai


On s’était brouillé à cause d’une femme
C’est vrai que t’as toujours aimé les jeux de dames
Elles te l’ont bien rendu et sans compter
Moi-même d’ailleurs j’ai cru… mais ça n’a pas duré
L’amour vit moins longtemps que l’amitié

Refrain

Je me demande souvent c’que tu deviens
Si tu te souviens de ce refrain
Qui marquait toutes nos complicités
Je te retrouverai

Je porterai ce feutre demain, pour rencontrer ma famille et bénir ma nouvelle nièce. J’aurai chaud à la tête et Soft dans la peau.

20.12.07

Mon protégé

C'est un bien bizarre de mot, celui-là. Jamais su trop qu’en penser. Bien avant d’être fort, par un caprice de la nature, et de disposer de ressources et d’un certain pouvoir pour le faire, j’ai voulu protéger mes proches, mais je crois n’y être jamais arrivé, je me dis même de loin en loin qu’ils se porteraient mieux somme toute sans ma force, mes ressources, mon pouvoir, dérisoires.

Il y a quelqu’un dont je me suis abstenu de parler vraiment depuis deux ans, ce qui en a intrigué plusieurs. On s’est demandé ce qui nous liait, pourquoi je le couvrais, on a risqué les plus rectales rumeurs.

Le temps est venu de clarifier ce mystère tant soit peu, maintenant que Bastien touche au terme de sa troisième session universitaire en ville. Le fait est que je me sens responsable, que je suis grandement responsable de l’avoir attiré ici et encouragé sans le vouloir à sauter des étapes. Et je ne saurai peut-être jamais si j’ai fait plus de mal que de bien. Le jury délibère.

La lettre reproduite ici, sous forme de fac-similé, jettera quelque lumière sur ce qui s’est passé. Il n'est que de cliquer sur Goulatromba...

19.12.07

Pépère lamentable: la séquelle

Jamais vu encore un truc pareil. Une photo-bulle, qu'ils appellent ça. Pour ceux, et surtout celle, qui croiraient pas Le Devoir, faut visiter ce panorama pris hier par Jean-Pierre Lavoie pour le compte de La Presse.

Le plus beau, pour moi, c'est que de tous les endroits et les envers de Montréal, le mec a choisi précisément celui que j'ai montré à ma blonde qui n'est pas ma blonde au retour de la Rôtisserie Laurier.

Je commence à croire qu'elle a eu tort, en fin de compte. Et s'il y avait vraiment eu UNE TEMPÊTE DIMANCHE!

18.12.07

My boy, the funny f...

Ce garçon-là...

On s'entend mal, ces temps-ci, mais il me fait comprendre néanmoins que le ridicule ne tue que ceux qui le craignent. Comme moi, par exemple.

Il m'envoie ce trio d'elfes dansants: lui, ma bru, sa fille. My boy, the funny f...

I love that kid, God help me. Il ne comprend pas tout, ni moi non plus, mais bon, j'en sais quand même un peu plus long. Par exemple, il se figure que je le désirerais copie conforme de son vieux. Quelle drôle d'idée. J'ai toujours été au fait que je ne supporterais jamais de me rencontrer moi-même, et je suis fier qu'il ait développé sa propre personnalité, et j'aime les traits qu'il tient de sa mère, que j'aimais, après (et avant) tout.

Surtout, ce n'est pas Justin Trudeau, ce perroquet stérile et stupide qui se renie lui-même et nierait ma nation pour honorer la mémoire d'un père qui lui portera toujours ombrage.

17.12.07

Petit quatrain pour Mandy


Arrive, reviens des États-Unis!
Ramène-moi ton cul et ta folie,
Je t'attends, sans faute, demain midi,
Je veux tes lèvres arrondies sur mon vit.

Pépère lamentable

Alors c'est ça. Hier midi, on était tout contents d'avoir passé une semaine sans chicane, à se ménager, à avoir des prévenances. Même sur le Web, ça compte. Comme au téléphone.

Mais la tempête. Mais la tempête! J'étais aussi déçu qu'elle, probablement plus, parce que j'étais horny comme un lièvre alors que je venais de l'envoyer se branler luxueusement quinze minutes avant. Le Web, toujours.

Il ne tombait pas de neige à Sherbrooke. Donc il n'en tombait nulle part ailleurs. S'il fait du soleil en Estrie, il en fait partout! Et le monsieur des autobus, qui assurait qu'aucun départ n'était compromis! Elle m'en parlait encore à minuit. Et son envie à elle, urgente, impérative, que j'arrive de suite? Qu'étais-je, alors, sinon une fiotte? Y EN A PAS, DE TEMPÊTE!

Et ce phénomène, cette créature qui m'est chère et m'émeut parce que, hein? à chacun sa chacune; croyez-vous que l'article du Devoir d'aujourd'hui (signé Fabien Deglise) intitulé Le Québec sous le blizzard, qui recense les sorties de route, les problèmes d'autobus et d'avions, les conseils de rester à la maison, croyez-vous qu'une seule phrase là-dedans ou l'accumulation de toutes l'amènera à résipiscence, voire dans le proche voisinage? Think again. Parce qu'il n'y a pas eu de tempête hier. Me semble que c'est clair.

16.12.07

Escaping


I knew a girl once, or rather I tried to, but she was one-of-a-kind, a creature I'd never met before, nor had I encountered any of her traits in another woman in the course of my adult life. Twenty-five years since my first contract with a girl, such contract running anywhere from a single night up to marriage, and since then many more contracts than I would care to admit or could even remember, but resulting in what qualifies as experience, that awful, cynical thing, that point where you'd be a fool to expect anymore surprises.

And still, there she was, real as can be. She was a superbly, almost criminally talented poet, words seemed to dance right out of her fingers and straight to the screen where they placed themselves in harmony, and then sense and meaning grew out of the words, as if organically. It was really something.

Why then could I never get more than two or three sentences out of that girl, in the tens of hours we talked during the dozen times or so we met and the hundreds of times we chatted, more than two or three lines that were not moronic, futile, childlike, dishonest, sophistic, circular or downright hysterical?

She was fluid. No personality to speak of. Nothing solid, nothing concrete. Nothing resembling a moral center or a principle, nothing she could hold on to in times of distress, which were of course many. She let herself be a slave to her own unending petty desires, the satisfaction of which mobilized her entirely and carried her from one moment to the next, pushing further away the dreaded task to think, reflect upon her life, judge herself and make real decisions. That prospect scared her to no end, and I was powerless to help. She was never in one place, be it physical or emotional or frame-of-mind, long enough for me to connect. She made escaping each instant her main activity, not really aware that it consumed her, and also the energies of those around her. She went relentlessly through life asking, demanding, pleading, whining, begging, commandeering, like some sort of ancient mythological beast ravaging the country, demanding to be fed, endlessly. She could not give a thing in return, not even her body, since her pleasure obsessed her, devoured her soul, and her body was but a conduit to that end. another black hole from which no light escapes, no tangible matter, nothing, neither flesh nor sunday shoes. She thought herself a good, compassionate person, with a heart and everything, but the truth is she was sentimental, like most of her contemporaries, brought up on tv and movie magazines and slogans and sob stories, and she was naturally equating crying for herself with what she thought feeling for another might be like. She never could grasp the basics, risk a place in her chest to love and trust and cherish someone, not even for an hour. She just could not bring herself to stick a toe out in the rain. Had she not been such a gifted and inspired artist, one would have dismissed her as just another flaky brainless nutjob, but that poetry, the flat solid fact that she knew a place in herself where no fear entered, no primal lust nor hunger nor capriciousness nor dumb automatic defensive jibberish, a place where her mind could flourish like an orchid in a greenhouse, well, it shaked the shit out of my cozy boring certainties, forced me to revisit my experience, and I'm glad at least for that. That, and that I'm still sane after all.

What a character that girl was...

L’aveu aviné clarifie

Il n’a pas vu le mur venir
Un cul-de-sac en plexiglas
Dont il pressentait la présence
Au détour doux de chaque danse
Qu’il obtenait de sa promise
En moulant l’air mais la balise
Ne se laissait pas découvrir
Fluctuant invisiblement
Aux environs du no-man’s land
Et quand il heurta la paroi
Pissant le sang par les narines
Il put enfin marquer l’endroit
D’éclaboussures alizarine.

Scot salads


Je me demande ces temps-ci quand ce damné Kanienkehaka (Monsieur McComber pour les proches) se reposera de m’épater. Chaque jour qui passe, il se surpasse. Il nous a bien eus, tous, moi le premier, avec sa prose joual, qu’il travaillait si sérieusement, si amoureusement qu’on croyait fatalement que le gars n’avait pas le choix, qu’il serait incapable de torcher un feuillet classique si sa vie en dépendait, qu’il était sympathique et fanatique et authentique mais pas dangereux, littérairement, pour autant.

Eh bien, il a baisé tout le monde et c’est plaisir de voir ce beau sauvage nous sortir page après page de mots qui coulent comme un ruisseau en charriant du sens, de l’émotion, même un tranquille et sûr art de vivre. Il écrit le plus clair du jour et de la nuit, puis il se désennuie en faisant des jeux de mots, des jeux d’esprit. C’est Big Mac : first I take Manhattan, then he takes Berlin (ou Budapest, c’est pas sûr encore).

Il m’autorise à reproduire cette histoire, publiée en commentaire de son blog ce soir…

Ce Niçois, donc, il me racongte, tu vois, il me dit comme ça :

— Si tu passe par ce coing, eng bicyclette, faudra bieng faire attengtiong, le mating. Avang de partireeeu, qu'y a pas trop de vengt. Parce si tu fais pas gaffe, tu vas te faireuh jeter au bas de la falaise. Faudra bieng te méfier du Mistral.

Je luis dis :
— Blebeeehh non. C'est mon pote.

Il me dit ensuite, et c'est assez ahurissant :
— Quangd y se lève, le Mistral. C'est pour trois, six, ou neuf jours. Jamais moings. Y se lève jamais pour une seule journée. Il est comme ça.


Putaing...

15.12.07

Anne Archet est une fille, et autres considérations sur la guerre.

Il n’y a aucun, aucun, absolument aucun doute possible sur le sexe d’Anne Archet. Et, by the way, elle n’est pas non plus un combo de Zhom/Lady Guy. Comment je le sais? Elle me l’a dit, et Lady ne m’aurait pas menti.

Archet est une fille parce qu’elle trouve que c’est une bonne idée, que je laisse tomber ma guerre. Elle a peur pour moi. Elle croit que je peux pas gagner contre la calomnie (ce en quoi elle n’a pas tort, but that’s not the point). Elle suggère que je traite ça par le mépris. Bref, c’est une fille. Et quelle fille! Je l’adore.

Eh bien non. J’y songeais, c’est vrai, à faire des déçus et des soulagés, parce que je n’ai pas coutume de demeurer fâché durant des semaines, que je déteste ça, que je ne suis plus endurable, que je me chicane avec ceux qui me sont les plus chers.

Tout ce temps, y a que ma blonde qui n’est pas ma blonde, parmi les filles qui m’aiment un peu, beaucoup ou passionnément, depuis peu ou depuis longtemps, y a qu’elle qui ne m’ait pas poussé à abandonner, Dieu la bénisse, et quand je lui ai fait part plus tôt ce soir de mon hésitation, elle a répondu d’accord, mais alors faudra faire une note! She’s a mean mama, between you and me…

J’ai des amis qui fourbissent leurs fusils en Charente, en Gironde, en Parc-Extension, en Estrie, en UQAM, en UNEQ, en toge, en tabarnak tous. Prêts à m’accoter, mais qui comprendront si je décide de slacker.

Franchement, avant ma conversation avec Anne, j’étais prêt à le faire. Maintenant, je me donne encore le temps d’y penser davantage. Péan, Dutrizac, Marie-Françoise TAGGART : ce serait vraiment trop injuste qu’ils s’en tirent comme ça, juste parce que je suis un bon gars.

11.12.07

Dimanche soir, ou comment tirer du sang d’une affiche, ou ne réveillez pas le Gmail Chat qui dort.

Elle: Mais je crois que la chose la plus moche que j'ai faite...
Je suis sortie de la salle de bain
Je regardais ton poster où tu es tout mimi
et je t'en ai étampée une câlisse de droite sur le nez
vraiment fort
Tsé
des affaires de gens saouls.
Lui: Tu te souviens, hier soir?
Elle: De quoi?
Lui: Je t'ai dit qu'au bar, avec Kevin, je me suis mis à saigner du nez.
[nose smile]
Elle: Han?
Wow.
C weird.

8.12.07

Livre de faces dans le dos

Avec Vigneau, OldCola est l'ami en qui j'ai la plus grande confiance. J'appuierais sur quasiment n'importe quel piton sans réclamer d'explication si l'un de ces deux-là le demandait. Mais quand Cola m'a invité sur FaceBook, j'ai pas voulu. Sais pas pourquoi au juste. J'avais rien lu encore de si terrible à propos du gizmo, mais l'instinct, les vibrisses du vieux chat de gouttière...

J'ai un pote, écrivain brillant et guerrier de la liberté, qui s'en est rendu compte et a tout nettoyé ce qu'il pouvait de lui-même là-dessus après quelque temps, et j'ai un autre pote, écrivain brillant et amant de la liberté, qui a fait pareil. Et j'ai ce pote, Tony Tremblay, poète brillant et incarnant la liberté, qui nous dit ici pourquoi c'est une bonne idée.

C pour câlin

Jeudi, enregistré Cabine C de peine et de misère. Christiane Charette m'a dit que j'avais l'air paf et m'a fait un gros câlin. Pu serrer la main de Daniel Pinard, que j'admire.

Ensuite, suis allé aux danseuses, première fois en vingt ans. Ai ramené Alice au Bunker, une sauterelle de ma connaissance. La nature a suivi son cours (d'éducation sentimentale).

Elle m'a vidé. J'ai dormi.

5.12.07

Lapointe: la vraie fiction

OK. Tout est résolu, net et réglé comme mon étrange cousine Maïté (je peux bien vous le dire, ce n’est pas un secret, c’est même sa fierté de n’avoir jamais saigné une minute en retard chaque mois de sa vie depuis l’âge de quatorze ans jusqu’à son cinquante-deuxième anniversaire, et de s’être privée d’homme pour ne jamais troubler ce sacerdoce calendaire).

Résolu, dis-je. Le texte sur Lapointe a bel et bien été publié, dans Moebius, en 2005. Sous le titre Puzzle, toutefois, et Bastien m’a aidé en se rappelant l’avoir vu dans cette revue, mais guère en oubliant quel numéro (107) et quel thème («Écrire la ville»). J’ai fouillé ma bibliothèque et l’ai débusqué, mais il n’est pas dans la mémoire de mon ordinateur, qui s’appelle Memory Babe III, parce que Memory Babe II m’a claqué à la gueule avant que j’aie pu tout archiver. Alors, hein, j’ai appelé Raymond Martin, le dernier des trois fondateurs de Triptyque, au poste depuis trente ans, un peintre amant de poésie qui publie, qui publie, un air de Hells assagi, une voix rare mais belle d’animateur radio nocturne, un chic vieux loup qui voit à tout, et comme de juste il avait ça dans sa machine, je l’ai reçu dans la minute.

J’étais à répondre au courriel d’un jeune apprenti-écrivain, j’essayais de le soulager de la hantise que l’édition est noyautée par une clique (d’abord parce qu’en pratique ce n’est pas vrai, ensuite parce que si même cela était, un artiste déterminé ne se laissera pas ralentir pour si peu, au contraire il aura l’instinct d’accélérer), je relisais ma réponse quand mon regard a accroché la liste des contributeurs au Moebius 107, imprimée en quatrième. Éric McComber. Kevin Vigneau. Et une lettre de Geneviève Robitaille à Jean Barbe.

Mac et moi, on se connaissait moins, à cette époque, et je n’avais jamais lu la présentation de Robert Giroux en tête de numéro. En lisant ceci, j’ai ri avant de recommencer mon mail au jeune auteur. «Éric McComber et Christian Mistral, eux, sans doute des citoyens de plus louche fréquentation, nous entraînent dans l’univers des rues nocturnes, des petites putes, des bars, de la musique, parmi ces «chanteurs qui ont la vie molle», ricane Mistral.

Les petites putes, je veux bien en partager la responsabilité avec Mac, même s’il n’y en a pas dans mon texte : après tout, il aurait aussi bien pu y en avoir. Mais ce ricanement qui m’est prêté, je n’aime pas, pas du tout, pas plus que cette intention d’insulter Lapointe en public qu’on s’est complu à m’attribuer pour exciter les passions, alors même qu’à l’évidence je ne souhaitais rien de tel.

C’est pourquoi je suis content de déposer ici cette dernière pièce et de la laisser à l’appréciation de chacun.

Puzzle


L’hiver d’avant celui qui passe, après ceux-là déjà passés, vers la fin sèche de 2003 (un soir crasseux, venteux et froid), Lapointe m’a téléphoné.

Avais-je des textes à lui montrer ? Qui parleraient de Montréal, la putain sale et transversale, et puis de crime et puis de vin ? Quelque chose de joli, de fatal et d’urbain, qui passerait à Cité Rock Détente comme une cuillerée de Benylin?

J’ai dit Éric, es-tu malade ? Tu t’es trompé de numéro, ou bien t’es chaud. Moi chuis Mistral, chuis pas Tabra. Il a dit non, je me trompe pas. Il a dit oui, chuis chaud un peu, mais c’est pas à Roger que je veux parler, c’est à toi, mon vieux. J’ai dit bon bon, je vous connais depuis longtemps, tu t’es pris le bec avec lui ou lui avec toi, ou quelque chose comme ça, en tout cas tu te réconcilieras et j’en serai pour ma peine. Il a dit non, final bâton, basta Tabra, on vient de travailler un an et il a scrapé notre ouvrage et faut que je reparte en neuf.

J’ai dit O.K., j’ai quelques textes, où c’est que t’es ? Il m’a dit où, c’était un bar pas loin d’ici. J’ai raccroché, j’ai respiré, j’ai téléphoné à Vigneau. J’ai dit choisis un tien poème qui pourrait faire une bonne chanson pour ce garçon, j’ai dit pars de Parc-Extension et rejoins-moi là-bas tantôt, dans une heure et quart environ, j’ai dit arrête de râler, je sais fort bien qu’il se fait tard et qu’on congèle, mais c’est pas tous les mardis gras qu’Éric s’offre à la poésie. J’ai imprimé dix inédits et puis je suis monté voir Steve et puis ma foi je n’ai pas vu le temps passer : quand mon cellulaire a sonné, c’était Vigneau comme de raison, disant que le bar était vide, hormis la serveuse et Lapointe qui ronflait sur une banquette. J’ai dit j’arrive, j’y vais j’y vole, surtout tente pas de le réveiller.

J’ai débarqué, j’ai dit la fille saura y faire, Éric s’endort seulement s’il connaît les gens qui l’entourent, et comme de fait, la fille au bar c’était sa blonde, et elle l’a extrait du sommeil d’une sweet façon.

Il était plus frais que jamais, ni chaud ni froid, ni brûlé ni gelé, ni fripé ni farci, ni mauvais ni ami, et je mesurais confusément d’un coup tout le chemin qu’il avait parcouru seul, et le progrès de notre singulier rapport. Car Lapointe et moi n’avions jamais entretenu quoi que ce fût qui ressemblât à des relations chaleureuses ; or, cette hostilité-là, franche, épidermique, naturelle et sans raison, cette intransigeance chargée de menace qui gâchait chacune de nos rencontres impromptues depuis le début, en des lieux illégaux et à des heures indues, ces feelings acides, en somme, qui sont des empêchements à la fraternité facile, avaient fini à notre insu par nous servir : Éric me laissait voir sa vérité, ce qu’il ne fait qu’avec effort, y compris à son propre examen, et cela tenait en grande partie à ce que je ne lui avais jamais menti. Je n’attendais de lui rien qu’il n’eût envie de fournir et il ne voulait rien de moi, puisqu’il avait Tabra.

J’ai mis longtemps à deviner pourquoi il aimait qu’on se casse et qu’on s’encaisse de loin en loin mais jusqu’au fond. Le deviner, l’imaginer, le déduire : écouter quand il me l’expliqua un matin mou déjà ancien. Il venait de conclure une conversation téléphonique avec son gérant, marchant de large en long dans sa chambre immense tandis que je picolais à la cuisine ; quand il revint, catastrophé, la face crampée d’un tourment mystérieux, j’ai été curieux, et quand j’ai fini, une heure plus tard, par savoir ce qui se passait, j’ai été pris d’une grosse tendresse pour cet homme-là, ce Lapointe, et d’un respect très clair enfin, et d’autres sentiments aussi, dont le regret qu’on ne soit pas amis. Ce qui s’était passé, pour faire court, c’était que son gérant lui avait parlé en gérant, plutôt qu’en pote intime d’avant la gloire qu’il était aussi, aux temps miséreux héroïques du cégep. Éric répétait : « C’était le dernier. Le dernier... » Le dernier humain en dehors de sa famille, homme ou femme, qui l’aime et l’entoure depuis les jours d’avant ce succès plein de surprises empoisonnées. Il était seul, ce matin-là, cet artiste adulé, comme peu d’hommes l’ont été, puisqu’il n’avait que moi en qui verser sa confiance, moi doté de sa certitude que je ne l’aimais pas. Il préférait cela, cette absence d’ambiguïté, dans la cuisine, le temps de se resituer dans un monde sans amis sûrs et désintéressés, le temps de respirer sans songer à séduire, égoïstement, et ça n’a pas duré longtemps, bien sûr, mais après ça on n’a plus pu jouer au jeu de s’écœurer. On a préféré s’éviter. On ne connaissait pas d’autre jeu.

Jusqu’au fameux soir froid crasseux où je l’ai rejoint dans ce bar avec mes textes et ceux des autres et mon Vigneau d’humeur sceptique. Éric a lu le tas entier, toute une pile de papier à grave voix d’écorce vive, de gueule de bois et de charbon, cherchant l’os et palpant la chair des strophes sages en rangs serrés, démontrant un sens aiguisé de la musique innée des mots en plus d’un flair de chat sauvage pour les trucs louches et les ficelles et la bullshit et les patchages, tous ces procédés innocents auxquels ont recours les auteurs depuis toujours et même avant quand il s’agit d’enfiler plein de perles en colliers cohérents, ces rustines et ces bouche-trous qu’on ne voit n’entend ni ne sent et tous ces vers en or à fou ces cuillerées de sirop doux qui font passer la médecine quand on se mêle d’écriture et de maîtriser la métrique, il voyait clair à travers ça et dégageait les idées fortes, il autopsiait la poésie tout en lui marquant du respect, chassant le beau le franc le dur, mêlant les mots à l’inaudible rythme soûl et personnel de son propre esprit créateur.

Des dix, un texte alluma son regard et enfla sa voix plus que les autres. C’était un morceau fort et fiévreux composé au terme d’une nuit consommée à jaser avec CGDR, inspiré par ses confidences et que je lui avais offert. J’avais hésité un instant avant de l’inclure dans le lot : Christian-Gilles le chantait déjà lors des modestes et sporadiques engagements qui, à cinquante-cinq ans, lui permettaient de patienter jusqu’à ce qu’on découvre son talent. Allais-je lui reprendre ce présent fabriqué avec son passé pour le confier à Lapointe, seulement parce que l’artiste en moi étouffait l’honnête homme? Foutre non. Il me fallait une meilleure raison que ça.

L’idée m’a traversé l’esprit qu’à vingt ans, ces considérations me seraient passées douze pieds par-dessus la tête : je n’aurais jamais songé sérieusement à peser mes mots et mes amis sur les plateaux d’une même balance, cela n’aurait rimé à rien, puisque les mots pesaient plus lourd, toujours, plus que l’humain et que l’honneur et que la vie, que la famille et que l’amour, que la santé, le bonheur et le reste de ces abstractions illusoires auxquelles un monde frileux accordait tant de prix. À vingt ans, oui, mais non plus aujourd’hui que j’approchais du double. Il me fallait une meilleure raison que ça. Deux fois meilleure au moins. Meilleure deux fois que l’ambition légitime de diffuser mon œuvre au mieux, de la servir, la planter dans une terre grasse et l’arroser en masse et lui donner du soleil. Cette raison miraculeuse, qui doublerait l’ancien modèle, cette formule améliorée capable d’englober, de contenir les dimensions inflationnaires de mon cas de conscience, cette métaraison, je me fis fort de la trouver sur le chemin du rendez-vous avec Éric, mais il faut croire que je marchai trop vite car il achevait déjà sa seconde lecture que rien ne me venait encore. Alors, pris d’un soudain mordant dégoût, comprenant que j’allais dépouiller mon ami CGDR en son absence et me déshonorer du même élan et mettre ça, ce geste froid de carriériste avide, sur le dos de l’idéal artistique, je rétrogradai sans ralentir, je crus sentir cramer le caoutchouc de mon cœur élastique, grincer la machine en surchauffe, mais rien n’y parut cependant que j’embrayais sur le sujet de la chanson, soit CGDR lui-même, et je brossai un tel portrait du personnage, tandis que Vigneau jouait fin seul au pool, qu’Éric en perdit tout intérêt pour les textes qu’il déposa sur la table voisine sans me quitter des yeux, réclamant d’en savoir davantage.

Quelques semaines plus tard, quand CGDR l’alla voir avec son CD maison et trois brouillons jetés au Bic sur des napkins, il fut reçu à bras brûlants. En quelques nuits blanchies d’alchimie chansonnière, ces deux improbables compères accouchèrent d’un hit brillant sous toutes ses faces de furieux feux, un engin calibré au rasoir, plein d’énergie féroce et d’images excitantes, et c’est déjà pas évident à faire tout seul, mais à deux ça devient carrément rarissime, et du premier coup ça ne se voit pour ainsi dire jamais. J’étais soufflé, admiratif, envieux, sur le cul, toutes valeurs confondues mais deux oreilles sous mon sommeil. CGDR, à ma demande mendiante, se renseigna discrètement sur le sort de mes textes et m’informa l’automne suivant, fort embarrassé, que Lapointe n’en retiendrait aucun. Trop poétiques. Pourquoi il m’a pas rappelé ? Trop occupé. Pourquoi j’ai pas su le toucher?

Trop débranché.

J’ai revu Éric hier, cette nuit en fait, ce sept mars 2005, au même bar susdit pas loin d’ici, en plein Plateau, rue Rachel, ça s’appelle le Tap Room pour ceux que ça intéresse. Paraît que des gens se font tatouer sa face dans le dos. C’était écrit dans le journal et il trouvait ça très drôle. Anyway, je lui ai fait faire une ligne, il s’est écrasé au pool, pour me remercier, j’imagine, ou parce que les chanteurs ont la vie molle. Il était un morceau de la ville, et moi un autre, et futé serait celui qui adjoindrait deux pièces du puzzle immense sans savoir à quoi c’est censé, ultimement, ressembler.

Dix ans moins dix-huit jours

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4.12.07

Mettre en contexte pour se mettre en train (3)

Ce retour aux affaires devrait s’appeler Vacuum III : Redux. Mais tout changer, adresse et modèles et liens, c’est vraiment trop compliqué. On attendra la version papier.

Je sais, je sais. Je n’ai rien ajouté au survol, depuis jeudi, et les plus enthousiastes soupirent aussi, se surprennent à douter… Et s’il n’avait cédé qu’à un vilain sursaut d’humeur, le Mistral? Un drogué, un soûlon, un sanguin, un rustre barbare, un pithécanthrope, un gougnafier et un fichu poseur par-dessus le marché : comment savoir avec ces bêtes-là, ces reliques d’un âge obscur où les landes au-delà de la clôture appartenaient aux loups, aux ogres, aux égorgeurs et aux escarpes, aux possédés qui savent leurs lettres et vont chassant les âmes simples avec de doux sons sur la bouche et le malin dans la prunelle, aux Gilles de Rais et aux Villon, peut-on jamais vraiment savoir? Et s’il n’avait aucune idée de là où il souhaitait aller?

S’il n’était plus que vent, désormais, dissipé avec l’ultime fumée du vin cuvé…

Et les faux culs, les pharisiens, les fourbes, se prennent à respirer plus librement pour absolument les mêmes raisons.

Sauf que non. On ne dort guère, en temps de guerre. C’est fortement déconseillé. Sun-Tzu n’en parle pas beaucoup, Von Clausewitz non plus, de ce qu’une armée d’un seul homme est supposée prioriser : stratégie, tactique, logistique, discipline et moral se disputent l’attention, l’énergie d’un seul esprit dans un seul corps, qui ne peut se reposer sans péril et qui, sans repos, perdra pourtant assurément.

Il va falloir prendre patience encore un peu. Rien de ceci n’aurait de sens si ma voix s’adressait au silence, à moins de consciences qu’il n’en faut pour atteindre la masse critique, le strict minimum de bonnes volontés qu’il faut pour avoir une chance de résister aux forces démesurées que je vais dénoncer, pour empêcher ce qui arrive d’aller plus loin, non par principe ni par orgueil mais pour sauver mon envie même de continuer à vivre et à écrire, deux mamelles d’une seule bête-mère. Je suis armé de mots, bien sûr, mais aussi d’une durable réputation de franchise et de dédain pour le faux, le conditionné, le politiquement rectangle, et mon dernier recours est de faire appel aux derniers de mes semblables encore libres, capables de penser par eux-mêmes et de se faire une opinion propre.

Ce blog est inactif depuis trois ans. Je visais en le rouvrant un retour minimal au taux de fréquentation antérieur, qu’il m’avait fallu un an pour atteindre, et je me donnais une semaine pour ce faire, à défaut de quoi je m’y mettrais quand même, car ceci ne peut attendre.

Or, en deux jours, ce chiffre a été atteint, doublé puis triplé. Triplé! Jamais eu autrefois, cependant, tant de visites singulières depuis la Franche-Comté, encore moins une telle affluence accourant de Colombie-Britannique, à croire que l’Alsama n’existe pas, que le pays s’est rabougri comme peau de chagrin ou un scrotum après le surf. À croire que des gens, là-bas, sont soudain saisis d’un grand désir de suivre le blog d’un écrivain Québécois. N’est-ce pas curieux?

Mon courriel initial aux gens de mon réseau, leur demandant de passer le mot (parents, amis, nerds, collègues, étudiants, journalistes influents, certaines catégories se recoupant), puis les blogueurs de notre tribu soufflant sur les étincelles, puis deux chroniqueurs web au lectorat immense, aux conseils respectés, tous deux rencontrés sur la Toile aux temps héroïques et devenus des chums pour moi et moi pour eux, ces deux-là faisant ronfler la fournaise au naphta, font qu’on va pouvoir s’y mettre sous peu.

À mon rythme, cette fois, et sur le champ que j’ai choisi, ainsi que je l’ai promis à l’inénarrable Stanley Péan la semaine dernière. Faudra d’abord finir mon bref survol, puis je passerai à Stanley, qui est un homme très occupé comme chacun sait et qu’il serait grossier de trop faire attendre (pas un instant de plus, je m’y engage, qu’il n’en faudra à mon conseiller pour finir d’étudier les éléments rassemblés et m’exposer mes options).

Ensuite, eh bien, je pourrai enfin entrer dans le vif du sujet et confronter une bonne fois le démon blond au cœur empoisonné de l’hydre : le moyen que je vois, c’est une douche écossaise, mais misère, ce sera délicat, sans doute le texte le plus difficile que j’aurai jamais eu à construire.

3.12.07

Chu un ti-cul avec un coat de cuir (chanter sur l'air de «N'importe quoi»)

Les torys devraient bander moins sur le rétablissement de la peine de mort et songer à légaliser le duel.

CGDR est venu m’apporter une grosse bière et son appui moral cet après-midi. Pourquoi? ai-je baillé en me grattant les cheveux. Il m’a raconté qu’Éric Lapointe s’était épanché sur mon compte hier soir, à TLMEP. «Ça m’a fait quelque chose. Il y est allé fort sans raison. Tu devrais te défendre.»

Je baille encore. Paraît que je lui dois cinquante dollars, à Lapointe. C’est vrai. On jouait au billard, je le battais toujours, il déprimait; pour le requinquer et me faire du fric facile, je lui ai gagé un rouge que parmi les cinq prochains clients à entrer dans le bar, il s'en trouverait un qui lui demanderait un autographe. Eh bien, il a gagné et j'ai perdu : dix clients plus tard, tout le monde s’en foutait toujours autant d'aussi bon coeur. Mais cette idée, aussi, de faire le juke-box organique, le haut-parleur vivant, de chanter les mêmes affaires soir après soir. Y a des disques pour ça, des vidéos. Peut bien déprimer. Moi aussi, je déprimerais, s'il fallait que j'écrive le même texte à chaque fois. En tout cas, il a gagné et ses cinquante dollars l'attendent.

Il a décliné mes textes, vrai aussi, mais c’est lui qui m’a appelé pour demander à les voir, je suis allé le rejoindre quelque part avec Kevin Vigneau, Éric a trouvé les mots trop intellectuels (splendeur, virulence, etc. : «Le monde vont pas comprendre…»). Quant à la suggestion d'une chanson sans refrain, c'était trop poétique: «Faut un hook pour que les Manons de l'est s'en rappellent!» Kevin avait cru entendre les manants...

Je retourne me coucher.

2.12.07

Crochets, coeur et couronne


C’est bien beau, sucer le venin hors des morsures qui vous chatouillent les chevilles, s’en gargariser et le refaire gicler bouillonnant à la gueule des crotales, c’est bien beau s’apprêter à péter des crochets, mais il n’y a pas que des serpents, ici-bas, surtout à hauteur d’homme, qui est moins basse, et l’oublier tandis qu’on lutte au sol dans la vase et les sifflements, c’est risquer d’arracher l’échec aux mâchoires molles de la victoire, c’est perdre la fin en chemin, lâchant la proie pour l’ombre. L’ombre d’un reptile vaut-elle qu’on y sacrifie tout sens de la lumière et de la couleur du monde?

Il n’y a pas que des pourris, des sangsues, des déçus, des amers et des folliculaires dans notre monde immédiat, même si on ne voit souvent que ça à force de satelliser nos relations humaines, étancher les compartiments de nos vies et connaître au fond très peu de nouveaux gens, de nouveaux lieux, qui ne soient virtuels.

Un homme de cœur en rachète cent méchants, il vous redonne un morceau de vous-même et vous inspire. Vendredi, Claude Martel, mécène et samaritain, je ne sais pas quel mot convient sauf homme de cœur, chirurgien dentiste à Saint-Lambert, m’a refait un sourire, sans rien attendre en retour, trois heures d’ouvrage assisté de Diane, des frais que je n’ose imaginer, tout cela lui étant venu à l’idée lors de mon passage à TLMEP. Je le tiens désormais pour un ami et je note ici son nom, son geste et son visage, dans mon journal à cette date : il m’a redonné foi au milieu d’une tourmente désespérante qui se prolonge, se prolonge…

29.11.07

Mettre en contexte pour se mettre en train (2)


Le douze novembre, tout seul chez nous, sans chercher le trouble, je me suis assis devant l’ordi et j’ai relevé mon courrier. Routine. Un message Google m’informait que mon nom était paru sur le Net ce jour-là. Routine. Dans un texte de Richard Martineau…


Pas la routine.

Depuis vingt ans, cette anguille humaine a pris un luxe de précautions inouï pour éviter de confronter quiconque serait susceptible de se défendre. Jamais on ne l’a vu débattre : ni dans un journal avec ses lecteurs qui soumettaient des réactions articulées, ni sur le web, ni à la télé, ni à la radio, ni au Dollarama, ni dans les magazines imbéciles qu’il a dégradés davantage avec cette insouciance tâcheronne qui le caractérise, et qui déguise pourtant bien pire : l’impuissance de cet homme-là, sa crainte permanente d’être démasqué (imprimée dans sa face, trahie par ces yeux furtifs et cet intarissable trou qui lui sert à dégoiser), et son hostilité sournoise envers sa propre société. Je ne connais pas de spécimen plus dégénéré, aussi nuisible que ce tartuffe parmi ce que ma génération avait de mieux à offrir et qu’elle aura produit de pire. Jean-Luc Mongrain croit au moins en quelque chose, et son discours est constant, et son action suit son discours. Gilles Proulx est un amuseur inoffensif sur cette échelle. Arcand est un journaliste. Mais qui, quel démagogue sans foi ni loi ni le moindre scrupule se mesure à Martineau dans notre génération? On a dit, un peu tôt, Jeff Fillion. Liquidé, Fillion, malgré les vœux de son auditoire. Un porc, ajoute finement Madame Martineau. Or, Fillion n’a jamais été, tant s’en faut, pernicieux comme ce bouffon avide, ce parvenu dévorant qui a aidé à l’éliminer. Combien de journalistes recoivent de la merde sous enveloppe au bureau de la rédaction et s’en vantent comme s’ils étaient le jeune Jean-Pierre Charbonneau se faisant tirer en plein Devoir pour stopper son enquête sur le crime organisé?

Précautions luxueuses, disais-je : l’homme s’y entend pour éviter plus fort que lui, aussi quand un Dany Laferrière l’estourbit d’un bref et brillant trait d’esprit à TLMEP, eh bien, tout le monde en parle. Encore et toujours. Il n’échappera jamais à ces mots qui le ligotent et le résument et le cuisent carbonisé : "Richard Martineau vit intellectuellement au dessus de ses moyens. Il dépense plus qu’il ne possède. Un jour, il fera faillite!". Il ne s’est trouvé personne, pas une seule voix pour prétendre que le coup était moche, même pas son ami Patrick Lagacé, nettement plus sérieux et d’une loyauté touchante, qui consacre de plus en plus de son espace rédactionnel à défendre l’indéfendable. Martineau s’en était pris à Laferrière avec son pitoyable arsenal ordinaire de majuscules, de citations juxtaposées, de questions rhétoriques et d’invectives atones. Plusieurs ont compris ce jour-là qu’il venait de basculer hors de sa zone pusillanime naturelle, qu’il se croyait enfin un redoutable intervenant intellectuel, bref qu’il divorçait du réel. Moi, je l’admets, j’ai eu pitié. Jeune, il écrivait fort et pensait jusqu’au bout d’une chronique. Sa corruption n’a rien de réjouissant pour nous autres qui sommes de la même fournée

Ça ne lui a pas servi de leçon, évidemment. Et de l’immonde gâchis de sa rencontre télévisée avec Dieudonné, qui l’a croqué comme un mulot, Louise Cousineau a fait un compte-rendu. La bataille a pogné. Je me suis retrouvé au milieu, mon nom lancé comme un caillou par ce saltimbanque paniqué en direction de sa critique.

Lisez cet article. On l’a altéré. Il finissait par crisse de folle. J’ai écrit à Louise Cousineau pour regretter à sa place la conduite inqualifiable de Martineau. C’est resté sans réponse. Mais l’injure à la journaliste a disparu, le Premier Ministre a eu droit à un Mea Culpa, et je me ramasse avec les sales majuscules du guignol qui se fout bien des conséquences.

Ma foi, il est peut-être temps de lui rappeler ce qu’on peut faire avec un clavier. Mais laissons-le se lamenter qu’on le poursuive, laissons-le revenir de son ébahissement. Quoi! Lui? Responsable?

C’était le 12. Johnny m’a conseillé de laisser couler. Je l’ai écouté. Il m’a aussi envoyé un enregistrement qui, m’a-t-il dit, méritait davantage mon attention. Grave. Dommageable. Cela, je ne l’ai pas écouté. Mais j’anticipe…

28.11.07

Mettre en contexte pour se mettre en train (1)

Suis d'avis qu'un bref survol de ce qui me ramène ici ne sera pas de trop, sauf peut-être pour les salauds. Je précise avant qu’on ne lise ce qui suit : rien de ce que je vais énumérer n’a suffi à me rengager dans cette damnée galère, ce blog, auquel j’ai assez donné et qu’il me plaisait de voir figé à sa place dans l’histoire de ce genre neuf, que d’autres développent à leur tour. Je n’ai pas rempilé quand Sophie et moi avons rompu, ni quand la lecture des journaux m’étouffait d’indignation, ni quand l’ignorance et la désinvolture de mes concitoyens sont devenues plus dangereuses que seulement tristes, ni quand j’ai préparé mon retour littéraire, ni quand j’ai éprouvé la solitude et le pressant désir de partager mes sentiments et mes idées. Alors ce qui va suivre, ce sont des clopinettes, ai-je estimé, même si elles survenaient toutes en même temps et que j’ai dû passer une pleine semaine, nuit et jour, à y faire face, là où elles se manifestaient, dans les commentaires de blogs que je fréquente où dans ma boîte à courriels. J’ai pulvérisé de la mort-aux-rats dans tous les coins, mais c’était pas chez moi, c’était chez des copains où la vermine me suivait, et ça devenait fort embarrassant. N’empêche, ça ne suffisait pas à me faire radouber la galère : s’il fallait mobiliser un navire de guerre chaque fois que des bestioles s’agitent, on n’aurait pas tort de questionner le jugement du responsable. Surtout si cette galère n’a pas été conçue à des fins martiales et belliqueuses, mais bien comme vaisseau de parole, de pensée, de poésie : de littérature. Faut un Pearl Harbor pour t’obliger à convertir ta belle galère de plaisance en destroyer gris qui pue le mazout et qui crache le feu.

À venir, donc, un bref survol…

Dérouiller

Seul quelqu'un qui a pris un break de blog de trois ans peut comprendre combien c'est coton de remettre la machine en marche. La technologie a changé, ce qui n'a pas changé n'est plus familier, j'ai passé des heures à seulement émonder mon modèle des liens caducs, et n'ai pas commencé à ajouter les liens neufs, vers Meth ou Zhom ou Mac, pour ne nommer qu'eux.

Ce n'est pas pourquoi je suis revenu. Je ne veux pas rester longtemps. J'ai dépoussiéré cette vieille tondeuse pour me défendre contre quelques salopards qui en ont pris pas mal trop large. L'affaire est délicate et je ne compte pas pousser une seule gueulante de dix mille mots qui noierait mon propos. Je vais exposer mes vues au fil des jours qui viennent, méthodiquement et honnêtement, car cela en moi n'est pas rouillé, et chacun se fera son idée.

On va peut-être même bien se marrer...